La Fed a donc altéré sa stratégie monétaire (voir ici pour le détail).
Ce changement repose sur 3 éléments majeurs
1 – Après avoir indiqué le montant de la réduction de ses achats d’actifs, elle n’a pas donné explicitement le profil de ses achats futurs.
Cependant, si les données économiques le permettent, elle réduira encore le montant de ses achats. Elle ne donne pas de date ou d’objectif précis comme en juin dernier lorsqu’elle indiquait qu’elle arrêterait ses achats d’actifs lorsque le taux de chômage serait à 7%.
En d’autres termes, elle ne se lie pas les mains par un engagement qui in fine pourrait la contraindre.
2 – La Fed constate une activité plus solide, pas forcément plus rapide mais avec un risque de repli beaucoup plus faible qu’il y a quelques mois. Les risques sur l’activité sont perçus comme équilibrés.
En juin le communiqué parlait de risque fort à la baisse de l’activité. Ce terme a disparu.
3 – La Fed ne s’attend pas à une convergence rapide du taux d’inflation vers sa cible de 2%. Dans ses projections elle considère que ce taux de 2% sera le haut de fourchette de ses prévisions en 2015 et 2016. Or elle lie sa réflexion sur une hausse des taux d’intérêt à un taux d’inflation anticipé à 1 – 2 ans à 2.5% (0.5% au dessus de sa cible).
Ces trois conditions peuvent se lire ainsi
La Fed commencera à réfléchir à remonter ses taux d’intérêt que lorsque le taux de chômage sera à 6.5% et le taux d’inflation anticipé à 1 – 2 ans sera de 2.5%.
Si elle se tient à ses engagements alors elle ne bougera pas ses taux jusqu’en 2016 en raison de l’absence de hausse forte des prix à la consommation.
La réaffirmation de cette trajectoire de l’inflation est le facteur important dans le propos de la Fed.
Par ailleurs, si l’économie suit un profil plus robuste avec un risque plus limité de repli alors la Fed pourra mettre en œuvre une stratégie de réduction supplémentaire d’achats d’actifs financiers. La situation plus robuste, plus équilibré de la croissance l’incite à rentrer dans une logique qui lui permettra dans la deuxième partie de l’année de cesser d’acheter des actifs financiers.
Le renforcement de l’activité économique est le support de la Fed pour réduire ses achats d’actifs et un taux d’inflation durablement en dessous de sa cible de 2% la contraindra à maintenir ses taux d’intérêt très bas.
La différence avec les propos de juin est qu’il n’y a pas d’engagements sur un profil programmé de réduction des achats d’actifs. C’est aussi le renforcement de l’activité clairement indiqué qui permettra de réduire les achats sans prendre le risque de fragiliser la croissance. C’est la réaffirmation d’un taux d’inflation très bas pour garantir des taux d’intérêt très bas très longtemps.
La question est de savoir comment les investisseurs vont réagir à cette configuration? Vont-ils accepter le scénario de la Fed sans rien dire ou vont-ils rapidement commencer à anticiper des taux d’intérêt plus élevés au fur et à mesure du redressement de la croissance? Cela pourrait inciter la Fed à plus de volontarisme dans le cadre qu’elle a défini ce soir, notamment sur l’objectif de taux de chômage.
Comme je l’évoquais ici et là, c’est ce cadre sur le maintien des taux d’intérêt très bas qui sera important au cours des prochains mois. La réduction des achats c’est, comme l’a évoqué Bernanke, l’extinction programmé d’un instrument secondaire.
Ce qui compte ce sont les taux d’intérêt et si l’économie américaine est plus robuste elle ne présente pas encore de tensions. Elle doit donc conserver une politique très accommodante.
La confrontation entre les anticipations d’une économie plus robuste et la volonté de maintenir les taux d’intérêt bas sera le challenge des premiers mois de Janet Yellen. Eviter ainsi un aplatissement trop rapide de la courbe des taux de rendement sera l’enjeu de 2014.