Les résultats du vote américain, à 7h37, est favorable à Donald Trump. Le NY Times suggère une victoire de Trump avec une probabilité de 95%, pour CNN la possibilité d’une victoire de Clinton se réduit rapidement.
La victoire de Trump dans les Swing States comme la Floride, l’Ohio et la Caroline du nord laissent à penser que le candidat républicain sera le prochain locataire de la Maison Blanche.
Spontanément les marchés financiers s’ajustent brutalement avec une chute du peso mexicain et une hausse de l’or. Les marchés actions chutent partout et le taux d’intérêt à 10 ans américain recule fortement.
La probable victoire de Trump modifie en profondeur le scénario économique global.
Le principal risque est celui du repli sur soi prenant à revers près de 40 ans de globalisation. Au début des années 80, l’arrivée concomitante de Reagan et Thatcher avait lancé la longue période de globalisation. La logique était que celle ci réduisait les contraintes locales et autorisait une expansion plus durable. La victoire du Brexit au Royaume Uni puis celle possible de Trump inversent cette dynamique.
Le changement brutal est sur cet aspect car d’un seul coup la globalisation n’est plus le cadre de référence (voir ici). Si finalement les années 80 s’étaient plutôt bien déroulées c’est parce que les mesures prises de libéralisation, notamment sur le marché des capitaux, permettaient de réduire les contraintes qui pesaient sur l’économie.
Cette fois ci des entraves sur les échanges vont se mettre en place.
Le vote Trump s’est fait en grande partie sur l’idée que le reste du monde était responsable de la situation dégradée des Etats-Unis. Il faut s’attendre donc à la mise en oeuvre d’une stratégie centrée principalement sur l’Amérique. Cela se traduira par la remise en cause des traités dans lesquels les Etats-Unis sont partis prenantes. Sur ce point le président américain a les coudées franches car il peut agir sans l’aval du Congrès. Cela signifie que cela peut aller très vite. Ceci dit au regard des élections qui se déroulent en ce moment au Congrès, le président républicain pourra s’appuyer sur une majorité renforçant ainsi l’impact des mesures prises.
Plusieurs éléments à souligner
1 – Il pourrait y avoir dénonciation des traités existants et même de la participation des Etats-Unis à l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Cela se traduirait par la capacité à mettre en oeuvre les règles souhaitées par les USA sans contrepartie.
Deux aspects en découlent
Le premier est de redonner les coudées franches aux américains dans leurs échanges sans être contraints par les engagements passés. Cela vaudrait notamment pour les engagements vis du Mexique via le NAFTA.
Le second est que la sortie ou la menace de sortie de l’OMC permettra aux USA de fixer des droits de douane au niveau qu’ils souhaitent. Cela vaut notamment pour la Chine.
2 – Les négociations actuelles sur les traités commerciaux avec l’Asie hors Chine (TPP) et avec l’Europe (TIPP) ont peu de chance d’aboutir.
3 – Les USA souhaitent réduire leurs engagements politiques vis à vis du reste du monde. Le candidat républicain considère que la défense du monde occidental est un bien public qui coûte cher aux USA. Cette moindre implication peut être préoccupante pour l’Europe car l’équilibre politique risque de changer notamment au regard des offensives de Poutine.
Partout dans le monde où les Etats-Unis sont actifs cela peut provoquer de l’instabilité et de l’incertitude.
La conséquence est un risque de choc fort et persistent sur le commerce mondial. Cela touchera l’ensemble du monde et pas simplement les pays explicitement visés par les républicains. Il faut imaginer derrière cela des mesures de représailles de la part des pays ciblés explicitement. Un risque de rupture est créé sur l’ensemble de l’économie globale. Le risque de récession global est loin d’être nul.
Sur le plan interne, les baisses d’impôts promises seront mises en oeuvre et cela se traduira par une hausse significative des importations. L’objectif est de doper le revenu des américains et d’améliorer leurs dépenses. Cependant les USA dépendent pour une bonne partie du secteur manufacturier des approvisionnements en provenance du reste du monde.
C’est sur ce point que la situation va être intéressante car il va falloir composer entre les deux points ci-dessus. Les importations vont augmenter pour satisfaire à la demande interne alors que le commerce mondial subira le choc évoqué ci dessus et que les importations seront davantage taxées. Cette contradiction accentue le risque de récession en accentuant les dynamiques incompatibles entre ce qui est souhaité en interne et le choc provoqué sur la dynamique globale.
Le monde qui n’allait pas très bien devient encore plus risqué et c’est un signal négatif pour l’ensemble des actifs risqués qui est en repli ce matin. En revanche les taux longs sont orientés à la baisse.
Parmi les autres points à souligner
Cette contradiction entre la dynamique interne et les contraintes résultants du choc sur le commerce mondial avec notamment la hausse des droits de douane se traduiront par plus d’inflation aux USA. La raison est que la production interne ne pourra pas répondre immédiatement à la hausse de la demande et cela provoquera des pressions à la hausse des prix. La hausse des droits de douane accentuera ce phénomène.
La situation de la Fed est à risque. La probabilité d’une hausse des taux en décembre chute fortement. Mais au-delà de cela l’indépendance de la banque centrale américaine sera remise en cause très rapidement. (cf ici)
La signature de l’accord sur le changement climatique (COP 21) sera remise en cause.
Tous ces éléments sont des signaux préoccupants et négatifs pour l’économie américaine mais aussi pour l’économie mondiale. Le cadre change dramatiquement sans que l’on puisse cerner le cadre à venir. On ne peut pas imaginer que le repli sur soi soit une bonne stratégie puisqu’il reflète une approche non coopérative et non coordonnée.
Et je n’ai pas parlé des questions sur l’avortement, les armes, les immigrés, le mur avec le Mexique…..