Le prix du bitcoin est désormais au voisinage de 70 000 $.
En dehors des thuriféraires, les questions restent posées sur la rationalité de la valorisation de cet actif.
Pour certains, ce serait l’avenir des systèmes monétaires, mais cela manque de fondements théoriques.
Pour d’autres, c’est un objet d’investissement spéculatif.
Les autorités américaines ont donné la réponse à cette interrogation existentielle en autorisant la création d’ETF (fonds de placement en valeurs mobilières qui peuvent être côtés en bourse).
Depuis, le cours a doublé. Le bitcoin apparait comme un actif reflétant les anticipations des investisseurs avec le risque d’une volatilité nettement plus marquée.
Le prix de la cryptomonnaie est à un niveau record, plus de 70 000 dollars. Le graphe d’illustration est tout à fait étonnant.
Certes, l’environnement est plutôt à la hausse des marchés financiers sur les places occidentales. Les marchés boursiers sont au plus haut.
Le CAC 40 est au-delà des 8 000 points, le Nasdaq, l’indice des valeurs technologiques US est à son plus haut et même le Nikkei japonais a retrouvé son niveau de la fin 1989.
À l’époque, l’économie japonaise faisait figure d’épouvantail et aux US, la crainte était de voir l’emprise des sociétés nippones réduire les capacités de l’économie américaine à faire face aux défis technologiques.
Cette confiance dans la dynamique des entreprises se retrouve dans le rétrécissement des écarts des taux d’intérêt sur les obligations d’entreprise et les taux de rendement des obligations d’État.
L’idée sous-jacente est que l’avenir passe par le dynamisme des entreprises pour résoudre les questions existentielles qui nous animent. Que ce soit celle de notre avenir commun via la transition énergétiques, soit notre potentialité à engendrer de la productivité et des revenus via l’intelligence artificielle.
L’or est également au plus haut. Le métal précieux a tenu son rôle lors de la période d’inflation. Le prix de l’once, déflaté de la hausse des prix aux USA, est quasiment stable depuis le début de l’épisode inflationniste. Ce prix déflaté est, depuis le premier trimestre 2021, en hausse de 6% à la fin du mois de février. L’or a tenu ses promesses contre le risque d’inflation.
La traduction de ces différents éléments est que le monde trouvera des solutions aux défis auxquels il est confronté et dans un contexte où quoiqu’il arrive, les États seront très présents pour mutualiser et amortir les chocs mais aussi pour donner les impulsions.
Pendant la pandémie, mais aussi, notamment en Europe, lors de la crise énergétique les Etats ont été très actifs. Ils le sont aussi sur la question des relocalisations et du renouveau de l’industrie afin de faire face aux enjeux de la polarisation et aux incertitudes dans la recomposition de l’économie mondiale.
A très court terme, le reflux de l’inflation devrait se traduire par un relâchement des politiques monétaires, une baisse des taux d’intérêt et le maintien d’une forte liquidité. Des facteurs qui sont toujours très favorables aux marchés financiers.
Et, le bitcoin dans tout cela ?
Cette cryptomonnaie est un objet un peu étrange, car elle ne repose sur aucun support réel.
Les actions ou les obligations d’entreprises ont pour support ultime le comportement des entreprises sous-jacentes. L’or a la vertu historique d’être un actif matériel et palpable, capable de garder la valeur, notamment en période d’inflation. C’est ce qui était évoqué plus haut.
Mais, quel est le support du bitcoin ? À quelle question cet actif est-il censé répondre ? La réponse technique sur l’utilisation de la technologie de la blockchain n’est pas suffisante.
Souvent, l’argument avancé pour l’utilisation du bitcoin est celui d’une monnaie qui suppléerait les systèmes financiers. Dit autrement, ces modèles font référence à l’idée que les monnaies émises par les banques centrales ne sont pas efficaces et qu’il serait souhaitable d’avoir des monnaies privées qui soient en concurrence. Un taux de change existerait entre les monnaies privées.
La tentation pour les systèmes existants est d’élargir les capacités à créer davantage de monnaie, suggérant la possibilité d’une forme de fuite en avant susceptible d’engendrer de l’instabilité. Les cryptomonnaies comme le bitcoin, par construction, s’affranchissent de ce risque en définissant un encours qui ne pourra pas être dépassé pour des raisons techniques. Il manque quand même un élément à la monnaie décentralisée car l’émission de monnaie elle-même est centralisée.
L’étape suivante a été de développer la capacité du bitcoin à être effectivement une monnaie de transaction. Cela a fonctionné un peu, mais le manque de liquidité a fragilisé cette propriété essentielle de la monnaie. Il peut y avoir des transactions mais cette monnaie ne parait pas avoir les capacités à supplanter la monnaie des banques centrales pour des transactions courantes.
S’il ne peut être une monnaie de transaction avec toutes les qualités requises, le bitcoin est désormais considéré comme un actif de placement.
Les autorités américaines ont autorisé, le 10 janvier dernier, un ETF sur le bitcoin. De grandes sociétés de gestion US se sont précipitées. La taille des ETF a grossi très vite atteignant vite 50 milliards de dollar, le prix s’en est ressenti passant de 46 000 $ le 10 janvier à 70 000 à la mi-mars.
Finalement, la possibilité de créer des ETF sur le bitcoin a validé l’idée que c’était un actif de spéculation reflétant, surement à l’excès, les anticipations des investisseurs.
Son profil ne devrait pas être très différent, en tendance, de celui des autres actifs risqués, pour lesquels la rationalité des cours est plus assurée, mais avec le risque d’une volatilité plus forte.