Pour Kindleberger, la dynamique financière n’est pas stable par nature. Il faut un leader, un hégémon qui, par son action, la garantisse lui donnant les caractéristiques d’un bien public mondial. Tous les pays peuvent bénéficier de la stabilité financière sans qu’un pays soit pénalisé.
L’absence de ce bien public provoque un risque d’instabilité et un coût élevé. C’est ce qu’évoque Kindleberger dans son livre sur la grande dépression à propos des années 1930.
Pour que ce bien public existe, le garant doit être intégré dans l’économie globale, doit avoir un rôle moteur dans la croissance et l’innovation, doit bénéficier d’institutions stables et disposer d’alliances géopolitiques fortes. On retrouve le Royaume Uni du 19ème siècle et les Etats-Unis de l’après seconde guerre mondiale. En satisfaisant ces conditions, la monnaie de l’hégémon peut être une monnaie de réserve et ses actifs peuvent être les actifs sans risque.
On perçoit alors la dynamique de la stabilité financière. En cas de choc, les investisseurs vont se ruer sur les actifs sans risques de l’hégémon, réévaluant le dollar et le prix des actifs sans risques. Dès lors, les réserves des banques centrales se revalorisent donnant des capacités supplémentaires d’intervention pour réduire les risques de fragilité du système financier et les effets de contagion. La banque centrale de l’hégémon peut, comme le fait la Fed, mettre en place des lignes de liquidité pour accentuer encore cette capacité à stabiliser l’économie. Cette partie est celle que j’évoquais hier dans la partie 3.
La dynamique simplifiée présentée s’accompagne souvent d’interventions de grande ampleur de la banque centrale de l’hégémon. On se souvient de la Fed en octobre 1987 ou après la faillite de Lehman en 2008.
Aujourd’hui, les investisseurs peuvent avoir un doute quant à la volonté des Etats-Unis de tenir cette fonction. Les executive orders, les tarifs douaniers et la dynamique isolationniste de Washington pourraient se traduire à terme par une perte de confiance dans le dollar et dans les actifs sans risques.
L’absence de leader capable d’assurer la stabilité aurait des conséquences de grande ampleur sur l’économie globale, mais ni la Chine et la zone Euro ne sont pas susceptibles de remplacer les Etats-Unis et le dollar.
Pour que la zone Euro puisse être candidate il faut qu’elle mette en œuvre toutes les réformes évoquées depuis un an et la publication des rapports Letta et Draghi pour renouveler son capital de croissance et d’innovations.
L’Europe a des atouts, une BCE puissante, l’euro est la deuxième monnaie de réserve. Elle doit aussi disposer d’actifs de référence pour servir de refuge d’où l’importance de l’Union des Marchés de Capitaux.
Hélène Rey, dans le Financial Times, veut croire en les capacités de la zone Euro à prendre le relais et à mettre en œuvre les réformes nécessaires. Il y a une opportunité à saisir pour éviter le risque du chaos.
A suivre