La dégradation continue des finances publiques repose la question du financement du modèle social.
Pour rappel, les dépenses sociales représentaient 1% du PIB en 1938, 15% en 1960, 25% en 1990 et 33% en 2023 (source Julien Damon sur Télos). La hausse spectaculaire traduit l’évolution de la capacité à soigner, mais aussi de prise en charge d’un grand nombre de situations de la vie. Ce modèle inclusif est une fierté de la construction de la société française.
Pourtant, son financement est une source d’inquiétude. Deux aspects à souligner.
1 – Le besoin de financement. Il est à la hauteur du poids des dépenses sociales et est perçu parfois comme un handicap pour la compétitivité de l’économie, mais également pour la soutenabilité du modèle économique et social.
2 – La structure des prélèvements. Le travail a une contribution très élevée qui interroge sur la contribution des autres sources de revenus.
Pendant très longtemps, ces questions ne se sont pas franchement posées. Durant les trente glorieuses, les forts gains de productivité permettaient d’augmenter rapidement le pouvoir d’achat tout en construisant un modèle social très protecteur. Les salaires augmentaient rapidement, plus rapidement que les autres sources de revenus. Cela a été la source privilégiée pour ce modèle social.
La moindre progression des gains de productivité a déséquilibré la construction. Pour satisfaire au développement du modèle social, la hausse des taux de prélèvement a compensé la hausse plus réduite des salaires.
Ce mode de financement était d’autant plus aisée que le travail est un facteur de production peu mobile et donc facilement taxable au contraire du capital qui peut vite bouger d’un pays à l’autre.
L’économie du modèle social est ainsi associée à un cadre très large avec une source de financement étroite. Cela pose deux questions
1- Les revenus, autres que le travail, ont des prélèvements plus faibles. Dans un travail récent avec Antoine Foucher, l’U2P comparait les prélèvements sur le travail, les actifs financiers, la retraite et l’héritage. Pour 100€ de revenus initial versé par l’entreprise, le salarié reçoit 54€, le reste est en prélèvement. Pour les revenus financiers c’est 70€, pour le retraité 86 € et pour l’héritier 94€. Un rééquilibrage permettrait de financer des services universels par l’ensemble des revenus et pas simplement par les prélèvements sur le travail. Cette question a été posée récemment sur les prélèvements des retraités et sur la possibilité d’une sous-indexation.
2 – Le vieillissement de la population et la faible progression de la productivité obligent à inciter ceux qui travaillent à le faire davantage. L’équilibre des revenus doit basculer vers ceux qui produisent et génèrent les revenus. Ces derniers alimenteront la demande mais financeront aussi le système de retraite par répartition parce que la capitalisation prendra quoiqu’il arrive beaucoup de temps à être mis en place.
A suivre