La croissance d’un pays peut se décomposer en trois facteurs. Le premier est la productivité calculée comme la production par emploi, le deuxième est le taux d’emploi, la part de l’emploi dans la population, le dernier est l’évolution de la population. On peut ainsi calculer la contribution de chacun de ses éléments à la croissance du PIB. C’est un exercice que j’avais fait il y a quelques semaines en comparant l’évolution non pas du PIB mais du PIB par tête entre la zone Euro et les Etats-Unis.
Cette décomposition permet de pointer les origines de la croissance. Une hausse du taux d’emploi a ainsi un effet immédiatement perceptible. C’est un objectif que l’on retrouve dans la politique économique en France. En augmentant le taux d’emploi, pour une productivité donnée, le PIB augmente plus rapidement.
Pour une allure donnée de la productivité, on voit ainsi le rôle majeur de l’emploi et de la population. Dans ces deux dimensions, les contributions peuvent être partagées entre les locaux et les étrangers. Aux Etats-Unis de longue date, les flux migratoires d’Amérique latine et d’Asie sont des sources majeures d’explications d’une croissance plus élevée qu’en Europe. C’est au regard de ce constat et des orientations nouvelle de la politique migratoire que les économistes s’interrogent sur le maintien d’un taux de croissance rapide outre-Atlantique.
En Europe, le rôle des flux migratoires a été plus limité historiquement. Leur contrôle est un instrument politique de nombreux gouvernements.
Des économistes de la Banque Centrale Européenne ont voulu y voir plus clair. (https://bit.ly/43lKyp0- Partant du constat de l’inflexion du rythme de croissance des populations des grands pays de la zone Euro et du vieillissement de sa population, les économistes de la BCE ont décomposé les contributions du taux d’emploi et de la population entre locaux et travailleurs étrangers.
Dans la reprise après la pandémie et jusqu’à la fin de l’année 2024, la contribution des travailleurs étrangers à la croissance du PIB est significative, compensant les contributions réduites des travailleurs locaux. Sur la période 2022/2024, les contributions associées aux travailleurs étrangers ont permis d’expliquer parfois presque la moitié de la croissance des grands pays de la zone Euro.
Dans l’étude de la BCE, les travailleurs étrangers ont gagné en qualification par rapport à la période pré-Covid. Ils ont donc une capacité à apporter davantage et ne sont plus systématiquement cantonnés dans des emplois peu qualifiés et mal payés.
Les contributions sont fortes en Espagne et en Allemagne et un peu moins en France. Pour l’Italie dont le rebond est important, les travailleurs étrangers ont une contribution réduite, presque inexistante …
Le modèle européen de croissance mute. Sans apport des travailleurs étrangers à la zone Euro, la hausse des revenus aurait et plus faible, accentuant le problème de la dette publique.
Dilemme politique fort…