Les relations entre les Etats-Unis et l’Europe ont dramatiquement changé depuis l’arrivée de Donald Trump. Son souhait de mettre en place des droits de douane a 50% en témoigne.
Historiquement les liens entre les deux régions ont pu ressembler à ce que Mark Mazower écrivait dans le Financial Times ce week-end : «… chaque partenaire doit beaucoup à l’autre et chacun a l’habitude d’utiliser l’autre comme une feuille pour réfléchir à sa propre identité et à ses valeurs ». De Tocqueville jusqu’aux années récentes l’histoire des relations s’est construite en partenariat.
L’Europe continue de s’inscrire dans un schéma qui avait permis la révolution industrielle, accepter les identités diverses, la confrontation d’idées dans un cadre qui, depuis les années d’après guerre, n’aboutissait jamais en conflit armé. Cette dynamique coopérative est particulière mais fructueuse. Les Etats-Unis l’ont longtemps accepté car c’était la meilleure façon de se substituer à un gouvernement fédéral comme aux USA.
Pourtant l’Histoire a changé. La vision de Washington n’est plus celle d’une Europe alliée et mettant en ouvre un schéma institutionnel original.
Avec Donald Trump, la perception du monde a changé, il est devenu une sorte de jeu à somme nul. « Pour que je gagne plus, tu dois perdre quelque chose ». C’est pour cela que l’Europe, trop diverse, trop coordonnée et coopérative, apparaît incompatible avec l’hostilité qu’a l’administration Trump de la coopération.
C’est là qu’intervient un texte récent publié par l’administration américaine. Le propos est d’indiquer que l’Europe telle qu’elle se présente nie ses valeurs fondamentales et fragilise la démocratie même. L’Europe doit, selon l’auteur, valoriser ses origines chrétiennes et appelle à construire une alliance civilisationnelle pour transformer les systèmes politiques européens en une série de nations chrétiennes à l’image de la Hongrie.
Pour infléchir l’Histoire, Washington a appuyé les partis d’extrême droite comme l’AfD en Allemagne et le PiS en Pologne. Cette offensive est aussi portée par le lobby technologique hostile à la régulation et la fiscalité souhaitées par Bruxelles. Washington voit dans cette régulation sur les données, une illustration de la perte de la liberté de parole en Europe, justifiant ainsi son offensive.
Deux remarques face à cette attaque
L’Europe s’est toujours définie par sa diversité, comme les Etats-Unis d’ailleurs. C’est la dynamique des Lumières derrière cela. C’est cette diversité historique que j’évoquais plus haut et qu’il ne faut nier en aucun cas sous peine de perdre son âme.
La deuxième remarque est l’ardente obligation pour les Européens de s’inscrire dans un récit qui est le leur. C’est cela le véritable enjeu, réussir à s’inventer un récit qui définisse l’Europe de façon autonome. L’Europe a des valeurs à défendre. Elle doit passer en mode offensif pour ne pas prendre le risque d’être déstabilisée.
C’est essentiel.