Le plan de relance européen tarde à être adopté. Il est probable qu’il le sera mais pas dans les conditions initialement proposées. Les Pays-Bas, l’Autriche, le Danemark, la Suède et désormais la Finlande ne souhaitent pas mutualiser autant qu’il serait souhaitable le choc sanitaire avec leurs partenaires européens.
La question d’après est celle de ce qui se passera si la solution trouvée n’est pas suffisante, si son montant est trop faible pour donner de nouvelles perspectives à l’Europe.
Si les européens ne peuvent se mobiliser face à la crise pandémique et ses conséquences dramatiques, alors l’Europe devient vide de sens. On est très loin de la construction politique initiale qui se définissait par la volonté de vivre ensemble afin de faire face aux aléas communs.
Car c’était cela le sens initial de la construction européenne. En faisant face collectivement à une situation particulière, les européens partageaient un mode de résolution commun, réduisant alors les risques d’affrontement.
La monnaie européenne est, par exemple, un médium susceptible de créer les conditions d’une résolution commune. C’était le sens du “whatever it takes” de Mario Draghi le 26 juillet 2012 à Londres. La monnaie n’est qu’un moyen alors que le but est de vivre et de construire ensemble.
Le sommet européen devait valider le plan de relance présenté à la mi-mai par Ursula Van der Leyen et s’appuyant sur les propositions faites par Angela Merkel et Emmanuel Macron.
Ce plan repose sur la capacité des européens à mobiliser 500 mds d’euros pour faire face, sans conditionnalité, aux conséquences de la pandémie. Le plan porte aussi sur 250 mds de prêts à taux bonifiés.
La discussion porte sur le montant total des subventions, le mode d’accès à celles-ci et le contrôle dans l’utilisation des subventions versées.
Ceci étant dit, plusieurs remarques peuvent être faites sur le plan et les options prises
1- Il est probable qu’un accord sera trouvé. Aucun pays ne souhaite être celui qui fera capoter un plan aussi important au risque de faire imploser les institutions européennes.
Les Pays-Bas sont trop dépendant de la dynamique européenne pour prendre le risque de créer une dissidence. C’est un petit pays dont l’activité est très liée à celle de ses voisins notamment pour le trafic maritime. Il est aussi probable qu’en cas d’échec, de nombreux pays se pencheraient sur les avantages fiscaux résultant de l’installation des sièges sociaux en Hollande.
2- Si un accord de grande ampleur et de mutualisation du risque n’est pas signé sur la crise sanitaire que l’Europe vient de traverser, sur quel type de crise observerons nous une conscience européenne ? Il y a une vraie question existentielle pour l’Europe.
3- L’accord pourrait se faire autour de 400 mds de subventions. C’est une étape réduite vers le fédéralisme budgétaire. On perçoit bien que l’accord éventuel ne se traduira pas par un approfondissement du partage de souveraineté. Les institutions européennes sont solides pour ne pas s’effondrer mais il est peu probable que de nouvelles avancées seront mises en place.
4- On peut alors s’interroger sur l’étape d’après si les mesures prises sont insuffisantes et ne permettent pas de sauver l’Italie par exemple. En effet, la situation italienne va rester au cœur des problèmes européens. Son manque de croissance est son souci numéro 1 et c’est le souci majeur de la croissance européenne. Le fait qu’il y ait désormais plus de retraités que de travailleurs n’est pas rassurant.. La BCE ne pourra pas tout faire pour compenser ces défaillances.
5- Ce plan était une opportunité pour donner davantage d’autonomie à l’Europe. Angela Merkel l’a bien compris. L’Allemagne ne pourra pas compter sur la reprise chinoise pour retrouver une forte trajectoire de croissance. Cela avait fonctionné en 2010, pas maintenant. De plus, le confinement qui se dessine à nouveau aux USA ne permettra pas d’avoir une forte impulsion pour la croissance européenne. Les européens ne pourront compter que sur eux-mêmes et la négociation de ce week-end montre que l’ordre est dispersé. Il est dommage que les européens ne saisissent pas cette opportunité. Il fallait probablement être plus égoïste pour l’ensemble des pays européens. Les américains et les chinois ne nous ont jamais attendu sur ce point. C’est cela le plus préoccupant dans le fonctionnement de l’Europe. Elle n’arrive pas à se mobiliser pour elle même.