Au regard de l’évolution des prix de l’énergie, la comparaison avec le premier choc pétrolier peut être éclairante.
Le premier graphe montre que les prix de l’énergie, en ce début d’année 2022, sont bien supérieurs à ceux constatés en moyenne en 2021. Pour le pétrole, le prix en euro est deux fois celui observé en moyenne en 2021. Pour le gaz et l’électricité, les chiffres sont encore plus éloquents.
Cela va se traduire par une dégradation significative de la balance énergétique, en valeur absolue et en % du PIB (second graphe). En 1974, le déficit était de 4% du PIB et jusqu’à 5% en 1981. Je ne sais pas si on atteindra ces niveaux mais cela traduit un prélèvement sur la richesse nationale.
Ces achats d’énergies à l’étranger doivent être analysés comme un transfert entre la France et le reste du monde ( je me souviens d’un très bon article de Jean Claude Barthelemy dans la Revue Economique sur ce thème)
Cela pose deux questions:
1 – Si la demande à la France des pays à qui nous payons est élevée alors l’opération peut être neutre. En revanche, si nous payons à des pays pour lesquels la demande à la France n’augmente pas alors le prélèvement est sans contrepartie et cela réduit d’autant les revenus à distribuer. On se souvient des effets récessionnistes des transferts du même type dans les années 1970 (la demande du Moyen Orient n’avait rien à voir avec les montants payés par la France)
2 – Comment sera réparti ce prélèvement ? Qui paiera ? L’Etat en mutualisant le choc, les entreprises, les salariés ?
Après le premier choc pétrolier, le maintien du pouvoir d’achat pour les salariés, avec une indexation des salaires sur les prix, s’était fait au détriment du taux de marge des entreprises. La question va être posée dans le plan de résilience de l’économie française. Qui fera l’ajustement? Après 1974, l’inflation a été très élevée en raison de cette indexation. Doit on refaire la même chose ?
La France et les autres pays européens sont face à un choix structurant. Il y aura prélèvement, qui le paiera ? Dans les années 1970, les salariés allemands n’avaient pas bénéficié d’une indexation aussi forte qu’en France. L’inflation y avait été plus faible et moins persistante. Cela vaut le coup d’y réfléchir mais attention au risque sociale car la structure de dépenses des ménages a changé avec des dépenses contraintes (engagées) plus importantes désormais.
Face à ces question, la copie de Bruno Lemaire et Jean Castex est très attendue.