Patrick Martin le patron du Medef évoquait le risque, pour l’économie française, d’être proche d’une situation de récession. Il est probablement trop tôt pour conclure.
Les données du 3ème trimestre ont été bonnes en raison notamment d’un effet lié aux Jeux Olympiques. Le PIB a progressé de 0.4% durant les mois d’été et l’emploi a continué de croitre d’environ 50 000 postes salariés.
Il y a trois niveaux d’analyse sur ce risque de récession.
1 – Dans ces notes de conjoncture de l’hiver 23/24 et du printemps, l’Insee avait clairement évoqué le profil chaotique de l’économie française. Le choc positif des Jeux Olympiques allait être suivi d’une normalisation assez marquée au cours des trois derniers mois de l’année. Les dépenses liées aux JO, l’afflux dans les transports, les restaurants ou les hôtels ont eu un caractère exceptionnel mais non durable. C’est pour cette effet, déjà observé après les JO de Londres, que l’Insee prévoyait entre 0 et -0.1% d’évolution de l’activité pour la période octobre-décembre. Une partie de la morosité viendrait de cet ajustement. Si c’est le cas, cela n’aurait pas d’effets durables. Les éléments cycliques habituels reprendraient alors le dessus au début de 2025.
2 – Le deuxième facteur est la récession allemande. Les ajustements y sont brutaux et la demande interne est médiocre. Le principal partenaire de la France n’est plus, actuellement, une source de soutien de l’activité. La perte de substance de l’économie allemande que l’on mesure par le repli profond de sa production industrielle traduit un manque d’intérêt de la demande étrangère pour les produits allemands et son incapacité à être pour l’Europe une source d’impulsion. Le niveau des exportations françaises en Allemagne est stable depuis très longtemps. Autrement dit, la déprime allemande est franchement pénalisante pour la France.
3 – Le dernier point est l’incertitude politique. Elle éloigne les investisseurs étrangers qui ne veulent plus construire d’usines en France selon le baromètre EY sur l’attractivité de la France. Ce n’est pas un rejet, car les entreprises ont venues massivement ces dernières années, c’est juste de l’attentisme. Sur les marchés financiers, l’écart de taux d’intérêt avec l’Allemagne reste élevé traduction de la méfiance des investisseurs financiers face au risque français.
Ces trois points reflètent des chocs négatifs pour l’économie française et un manque d’impulsion. La lecture des enquêtes auprès des entreprises est intéressante. Les indicateurs synthétiques sont sous leur référence de long terme (100 pour l’Insee et 50 pour SP Global). L’activité n’est pas florissante mais le niveau n’est pas cohérent avec ceux atteints soit pendant la récession de 2008/2009 soit pendant la pandémie.
D’une manière plus directe, la France souffre depuis un moment d’une dynamique manufacturière insuffisante. La production industrielle est au même niveau qu’au premier trimestre 2021 et la consommation en biens des ménages est peu dynamique. Elle est, hors énergie, 5% plus faible qu’au T1 2021, lors de la sortie de la pandémie. Associé à cette inquiétude, l’investissement des entreprises recule depuis le milieu de l’année 2023.
La perception d’un risque de récession vient donc de deux choses.
La première est cette situation conjoncturelle sans éclat mais qui n’est pas suffisante pour faire plonger la France en récession.
Le second point est le nécessaire ajustement des finances publiques. Le déficit est trop important et la consolidation budgétaire qui devra se mettre en place s’opèrera alors que le cycle est moribond.
C’est ce choc négatif qui fait craindre une récession. au risque d’accentuer les fragilités que l’on perçoit depuis quelques mois sur le marché du travail. La consolidation est inévitable mais comme souvent elle arrive à un mauvais moment dans le cycle. Un ajustement trop brutal serait alors clairement récessif.