Thucydide et Fernand Braudel permettent de comprendre les mouvements, Kindleberger est davantage dans l’analyse de la dynamique qui s’enraye.
Pour Thucydide, Sparte doit entrer en conflit avec Athènes dont la puissance augmente vite. L’approche intuitive est séduisante parce qu’elle paraît légitime et rationnelle pour comprendre le comportement dé celui qui se sent menacé. À l’aune des conflits passés, cette analyse n’apparaît pas totalement pertinente. Les cas qui remplissent les conditions évoquées par Thucydide ne sont pas nombreux. L’éclairage de Thucydide est d’aider à réfléchir.
L’approche de Braudel permet de comprendre la dynamique du capitalisme dans le temps long. Les déformations s’inscrivent dans la durée, traduisant des contraintes qui surgissent, une concurrence nouvelle ou un espace qui s’étend. Un aspect important de son analyse est la façon dont la puissance passe d’une ville à une autre. Cela révèle des ruptures et des situations de crises mais aussi la robustesse du capitalisme.
La description du cheminement européen est fascinante. De Venise en 1380, le centre de l’économie-monde passe à Anvers vers 1500 puis Gênes vers 1550, se déplace à Amsterdam vers 1600 avant de basculer vers Londres entre 1780 et 1815. Pendant la période de l’entre deux guerres, le centre de l’économie-monde traverse l’Atlantique et s’installe à New York. C’est cette dynamique qui suggère le basculement actuel vers l’Asie et Pékin. Après avoir épuisé l’économie américaine, le capitalisme se déformerait vers la Chine.
L’approche de Kindleberger apparaît, à-sur une durée réduite, comme plus immédiate et plus pertinente. Il considère que l’économie mondiale n’est pas stable par nature et qu’il faut, pour permettre son développement qu’une économie soit leader afin de définir des règles et des institutions. Dans son livre sur la grande dépression des années 1930, Kindleberger met en avant 5 conditions pour garantir cette stabilité par l’hégémon.
- Le maintien d’un marché relativement ouvert.
- La fourniture de prêts à long terme contracycliques.
- La surveillance de la stabilité des taux de change.
- La garantie de la coordination des politiques macroéconomiques.
- L’action en tant que prêteur en dernier ressort lors des crises financières.
Kindleberger insiste sur ces points et la fragilité du système économique mondial après la crise de 1929. Le système de change paralyse les modes d’ajustements macroéconomiques. Dans la panique, la coordination des politiques économiques ne fonctionne plus du tout.
Mais l’auteur insiste sur l’incapacité pour la Grande Bretagne de tenir ce rôle de leader en raison de son incapacité notamment à être le prêteur en dernier ressort alors que les Etats-Unis potentiel leader ne sont pas encore capable de jouer ce rôle.
L’actualité de l’analyse repose sur la défiance de Washington et l’interrogation d’accepter d’être le prêteur en dernier ressort.
À suivre