De longue date, la position et le rôle du dollar interrogent.
Après la seconde guerre mondiale, les accords de Bretton Woods avaient permis la mise en place d’un système monétaire stable. Cela succédait à la longue période d’errance monétaire qui avait prévalu dans la période d’entre deux guerres.
Pourtant très vite, sa position dominante et ses conséquences ont engendré des critiques. Jacques Rueff parlait alors du “déficit sans pleurs” incitant le Général de Gaulle à parler du privilège exorbitant du dollar lors d’une conférence de presse du 4 février 1965.
Jacques Rueff faisait implicitement le parallèle avec le jeu de billes lorsque le gagnant du jeu prête les billes qu’il vient de gagner à l’enfant qui les perd systématiquement. Le jeu peut continuer longtemps mais il n’est pas équitable.
Pour l’économiste français, les Etats-Unis, émetteurs du billet vert, pouvait toujours émettre entretenant une balance déficitaire avec la conquête de marchés étrangers par des investissements directs.
Aujourd’hui la question est posée différemment même si le problème soulevé par Jacques Rueff est toujours pertinent. Il y a deux dimensions. La première est celle du cadre macroéconomique global qui change rapidement. La rivalité entre les Etats-Unis et la Chine est aussi monétaire, les Chinois ayant compris que l’autonomie économique et politique sans autonomie monétaire était un leurre. L’autre aspect est la position de Donald Trump sur le billet vert. Doit il être fort, faible ? Quel sera le statut de la banque centrale dans la durée ? Autant d’éléments qui ont été discutés depuis les élections présidentielles de novembre 2024 sans pour autant proposer de réponse claire.
Les questionnements sur le rôle et le statut du dollar sont des éléments presque permanent du système monétaire internationale. L’arrivée de l’euro à l’orée des années 2000 et l’émergence récente du yuan n’ont pas encore bousculé la prééminence du billet vert. Dès lors l’interrogation porte sur les facteurs qui pourraient faire basculer les choix des investisseurs vers une autre monnaie.
La globalisation a d’abord été financière au début de la présidence Reagan. Le dollar et les marchés financiers sont alors devenus les facteurs structurants du développement global. Le billet vert est, depuis les Accords de Bretton Woods, le bien public international, l’actif vers lequel les investisseurs du monde entier se réfugient en cas d’incertitude.
Le dollar et les actifs américains ont ainsi acquis le statut d’actifs sans risque. Il est l’actif privilégié par les investisseurs lorsque le temps tourne à l’orage et c’est vers la Federal Reserve que les regards se dirigent lorsqu’il faut trouver une solution.
En raison de ce statut très particulier, tous les acteurs de l’économie ont d’importants portefeuilles en dollars, que ce soit à l’actif ou au passif. Dès lors, en raison des encours très élevés, un changement de repère sur la monnaie internationale doit être appréhendé comme un processus de long terme.



