L’Europe doit-elle continuer de déterminer ses propres règles ou doit elle accepter les règles dans un système fabriqué ailleurs ? C’est la question posée récemment par la commissaire européenne Teresa Ribera.
Dans un monde qui évolue très rapidement, de nombreuses voix se lèvent pour que l’Europe définisse son propre cadre, sa propre trajectoire.
C’est ce qu’exprimait récemment Jessica Berlin, politologue allemande, en indiquant que l’Europe devait disposer d’un corpus plus robuste pour ne pas être bousculé par les prises de parole ici ou là. L’Europe ne peut pas être sur le qui-vive en s’interrogeant de façon permanente sur les réponses à faire aux choix de la Maison Blanche ou de Pékin.
Au regard des négociations sur l’Ukraine, l’Europe ne peut pas maintenir des liens forts avec les US alors que les plans de paix présentés par Washington lui sont systématiquement défavorables. Les relations transatlantiques ne sont plus ce qu’elles étaient et les orientations à venir ne pourront plus se fonder sur les choix du passé. C’est une rupture qu’il faut pouvoir assumer.
Autrement dit, l’Europe doit faire des choix politiques, développer sa propre histoire et définir le chemin qu’elle veut emprunter. Elle doit se donner les moyens de dire « non » aux options prises par les autres pays. Sur cet aspect, l’Europe manque d’incarnation politique.
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L’autre dimension majeure est celle de la transformation de l’Europe. Elle est soumise, comme le suggère David Marsh dans un ouvrage récent, à la litanie des 6 D pour digitalisation, dé-globalisation, décarbonation, dette, démographie et défense.
Mario Draghi donne des réponses à ces questions en indiquant que le choc démographique, le vieillissement de la population, doit nous inciter à créer les conditions pour une productivité plus forte sous peine de se retrouver dans 25 ans avec une économie de même taille mais avec un endettement non soutenable. Le choix de la productivité est essentiel et conditionne l’ensemble de la trajectoire à venir de l’Europe, notamment en raison d’un endettement élevé. Si la croissance faiblit encore alors que les taux d’intérêt réels sont positifs la dynamique d’accumulation de la dette rendra la trajectoire de l’économie impossible à soutenir.
Le choix européen est de définir comment les 6 D seront mis en œuvre et comment l’innovation, celle qui permettra la hausse durable de la productivité, aura la capacité de desserrer les contraintes. Il faudra aussi définir des priorités sur les 6 D car tous ces objectifs ne pourront être mis en œuvre simultanément. Il faudra aussi faire des arbitrages et réallouer les ressources différemment de ce qui est fait actuellement.
Il faut enfin que l’Europe soit incarnée. C’est un sujet essentiel qui nécessite une transformation institutionnelle de l’Europe afin de donner une impulsion politique plus marquée et plus durable. Cela peut s’inscrire dans un cadre sûrement plus fédéral.
