Des minutes de la réunion des 6 et 7 août du comité de politique monétaire de la Banque d’Angleterre c’est le dernier paragraphe qui a retenu l’attention.
Pourtant, jusqu’alors les discussions étaient assez pondérées. Les interrogations portaient sur les effets d’une éventuelle hausse des taux d’intérêt sur l’activité, les salaires et sur la charge de la dette pour les ménages (la dette des ménages représentent 140 % du revenu disponible et est majoritairement à taux variable; d’où l’interrogation de l’impact d’une remontée des taux de la BoE). Rien à redire sur ces points (paragraphe 37). La Banque suggérait qu’elle allait remonter ses taux d’intérêt mais sans forcément de précipitation.(paragraphe 38)
En revanche le paragraphe 39 est hallucinant.Deux membres du comité Ian McCafferty et Martin Weale suggéraient l’enchainement macroéconomique suivant.
Partant du constat de l’amélioration du marché du travail ils observent l’absence de tensions sur les salaires. Ils indiquent qu’il y a un délai entre les deux étapes de la reprise. Mais comme il y a aussi un délai entre la hausse des salaires et l’impact d’une remontée des taux d’intérêt, ils suggèrent de remonter les taux d’intérêt dès maintenant afin de n’être pas en retard sur cette conjoncture qui reste malgré tout hypothétique:
“Since monetary policy, too, could be expected to operate only with a lag, it was
desirable to anticipate labour market pressures by raising Bank Rate in advance of them.”
L’économie britannique sort juste de sa plus longue récession puisque son PIB vient juste de revenir à son niveau d’avant crise. En revanche le PIB par tête n’est pas encore revenu à cette référence (-5%), la productivité décline et depuis 2010 les salaires réels reculent. Je ne suis pas sûr que ce soit les caractéristiques d’une économie ayant retrouvé un sentier de croissance équilibré.
Pourquoi vouloir la contraindre dès maintenant alors qu’elle est encore en phase de normalisation et prendre le risque qu’elle reparte en arrière? Pourquoi vouloir contraindre l’économie alors même qu’elle présente encore d’importants déséquilibres? C’est très surprenant et même inquiétant. Depuis de nombreux mois les interrogations des économistes sont sans réponses sur la baisse de la productivité et du salaire réel. Mais malgré cela il faudrait contraindre l’économie et fragiliser la reprise sans avoir trouvé les réponses aux énigmes qui jalonnent la reprise outre-Manche.
Cela rappelle un peu la mise en place des politiques d’austérité en zone Euro ou encore la remontée des taux d’intérêt en avril et juillet 2011 par la BCE alors que la croissance était loin d’être assurée.
Les trois graphiques illustrent ces fragilités de l’économie britannique. Les éléments présentés ne sont pas des signaux incitant à une remontée trop rapide des taux d’intérêt et surtout pas de façon pré-emptive
La longue sortie de récession
Le PIB par tête très en retrait par rapport à 2008 (à titre indicatif les USA sont à 102.2 au 2ème trimestre 2014)
La baisse du salaire réel (pouvoir d’achat)