Mario Draghi et l’unanimité des membres du conseil de politique monétaire de la BCE sont prêts à franchir le pas et à adopter des politiques non conventionnelles. C’est ce point qu’il faut retenir de la conférence de presse du 3 avril.
Cela signifie un point bien particulier qui est que les membres du comité de politique monétaire de la Banque Centrale Européenne considèrent qu’avec un taux de référence à 0.25%, la politique menée est probablement restrictive. L’innovation est là. La stratégie monétaire en zone Euro se heurte à la contrainte de non négativité des taux d’intérêt (ZLB : Zero Lower Bound) et à la nécessité de recourir à d’autres instruments.
Mario Draghi l’indique de façon claire:
Avec la politique monétaire actuelle, les risques sont toujours à la baisse de l’activité et sont aussi à un taux d’inflation durablement au dessous de la cible de 2% et même en dessous de la trajectoire qui avait été définie en mars 2014.
Il y a donc 3 points à retenir dans les propos de Mario Draghi
1 – La politique monétaire n’est pas assez accommodante même avec un taux d’intérêt à 0.25%. Il faut mettre en place un instrument complémentaire (non conventionnel) pour ne pas contraindre davantage l’activité et pour ne pas prendre éventuellement le risque de la déflation.
2 – Le Quantitative Easing est privilégié. Sa forme reste encore à définir parce qu’il sera forcément différent de celui mis en œuvre aux Etats-Unis. Il faut tenir compte de la structure de financement de l’économie qui passe davantage par les banques que par les marchés en zone Euro. Les actifs à privilégier ne sont donc pas les mêmes.
Cette option discutée lors de la réunion a placé en retrait des mesures comme le LTRO ou l’arrêt de la stérilisation des opérations SMP.
La hiérarchie a changé brutalement. Il faudra voir le mode de fonctionnement de ce QE à la sauce de la zone Euro notamment le montage pour contourner ce qui paraissait impossible jusqu’à présent.
3 – Si le QE est mis en place alors la BCE rejoint le club de toutes les autres banques centrales en pouvant jouer le rôle de prêteur en dernier ressort. Le prêteur en dernier ressort a pour mission de transférer le risque dans le temps. C’est la possibilité que donne le QE et en cela permet à la banque centrale européenne de réduire les contraintes actuelles et de les lisser dans le temps.
Le quatrième point sera le timing de cette opération. A priori, comme il y a une forte dépendance au système bancaire, cela pourrait attendre l’automne et les résultats des AQR (Asset Quality Review) qui sont en cours dans les banques de la zone Euro, à moins que des données macroéconomiques ne soient pénalisantes d’ici là (chiffre d’inflation plus en avril,….?)
L’intérêt d’une telle opération serait de faire grossir le bilan de la BCE et finalement de peser sur la valeur de l’euro. Les efforts de compétitivité mis en œuvre dans les différents pays de la zone ne seraient alors plus vains.
L’objectif sera aussi de maintenir des taux d’intérêt très bas et finalement de favoriser le retour de la croissance ce qui à terme facilitera la gestion des dettes publiques et privées. C’est aussi cela l’enjeu à moyen terme, réduire la menace que font peser ces dettes.