Verbatim de ma chronique du jour
La Banque Centrale Européenne maintiendra sa stratégie monétaire accommodante car la résolution des déséquilibres qui marquent la zone Euro ne peut s’inscrire que dans la durée. En outre, elle ajustera ses pratiques aux conditions de marché.
Le premier aspect est développé de façon récurrente par Mario Draghi. Il veut convaincre l’ensemble des intervenants que la Banque Centrale Européenne maintiendra l’ensemble des mesures prises jusqu’au bout. Il n’est pas question pour lui de laisser transparaitre la possibilité d’un arrêt avant la fin programmée de cette stratégie monétaire. Même si les résultats s’améliorent sur le plan conjoncturel, on l’a vu avec les chiffres de croissance du premier trimestre, la BCE maintiendra son taux d’intérêt très bas pour une période très longue, le TLTRO jusqu’en juin 2016 et les achats d’actifs jusqu’en septembre 2016 au moins.
La stratégie de la BCE est de considérer que les changements de comportement de l’économie de la zone Euro et des investisseurs ne s’inscriront que dans la durée. La politique monétaire doit maintenir son étreinte pour permettre à l’économie de la zone Euro de retrouver une situation plus équilibrée que celle observée ces 4 à 5 dernières années durant lesquelles la croissance de l’activité a été nulle et l’inflation a convergé vers 0%.
Car elle est là la problématique posée à et par la BCE. Il faut redonner de la vigueur à la croissance économique et pour cela la BCE a réduit ses taux d’intérêt à 0% et créé les conditions pour que l’ensemble de la structure des taux d’intérêt soit la plus basse possible. Cela doit faire baisser l’euro et permettre à l’économie de la zone de retrouver une dynamique d’activité plus robuste.
Mais il faut au-delà de cet aspect conjoncturel corriger et infléchir les anticipations dans la durée. Il faut que les chefs d’entreprise puissent imaginer que les conditions actuelles vont se prolonger, les incitant ainsi à mettre en œuvre des plans d’investissement. Car c’est uniquement par le biais de l’investissement que le cycle européen retrouvera une allure vertueuse. L’autre challenge est d’infléchir dans la durée le anticipations d’inflation pour écarter durablement le risque de déflation. Sur ce point la BCE présente régulièrement le profil des anticipations d’inflation à long terme et leur éventuelle convergence à long terme vers la cible de 2%.
La BCE veut recaler l’économie de la zone Euro sur une trajectoire qui n’est pas celle que l’on observe depuis plusieurs années. Les deux crises successives observées en Europe ont fait sortir la dynamique de la zone Euro du cadre qui était le sien. La rupture a été suffisamment forte et persistante pour que le retour au cadre antérieur ne se fasse pas spontanément. La BCE souhaite, par sa stratégie monétaire volontaire et volontariste, modifier le cadre. Ce ne sera plus celui d’avant crise car chacun s’accorde sur le fait que la croissance potentielle sera plus réduite dans la durée mais elle doit permettre de définir un cadre qui sera plus robuste et plus porteur en revenus et en emplois que celui issu de la crise des dettes souveraines et des politiques d’austérité.
Les propos en début de semaine de Benoit Coeuré, sur la modulation apportée par la BCE dans le profil de ses achats afin de s’adapter aux conditions de marché et au profil des émissions faites par les Etats, montrent que pour accroitre la crédibilité de son action, la BCE doit être encore plus active pour maintenir son emprise.
La politique monétaire a franchement changé en zone Euro durant cette crise. Elle s’inscrit désormais dans la durée mais reste très active dans le court terme. Pour accentuer cette dynamique ne serait il pas efficace d’avoir une politique budgétaire plus active et mieux ciblée afin de porter la croissance à deux bras plutôt que d’un seul ?