A la veille des élections américaine, l’environnement économique est toujours incertain. Aux USA la croissance est affaiblie en 2016 et le profil de l’économie mondiale est sur une pente modérée. Le commerce mondial évolue peu et ne constitue pas un stimulus pour les américains.
En d’autres termes, l’économie américaine si elle veut retrouver le chemin de la croissance devra compter davantage sur son marché intérieur que sur une impulsion externe.
De ce point de vue, les programmes des deux candidats à la présidence indiquent des solutions très différentes et souvent opposées.
Dans le programme démocrate d’Hillary Clinton, le schéma d’ensemble est l’acceptation d’un cadre cohérent avec la stagnation séculaire. Celle-ci se caractérise par une demande privée insuffisante pour garantir un taux de croissance robuste et par des inégalités de revenus importantes.
La solution prônée par Hillary Clinton est de mettre en œuvre des dépenses d’infrastructures dont le financement serait assuré par une fiscalité plus forte sur les revenus les plus élevés. L’objectif est ici de créer une impulsion sur l’activité interne et de réduire les inégalités afin d’éradiquer progressivement le risque d’une stagnation séculaire. L’objectif est ainsi d’infléchir à la hausse la trajectoire de la croissance en réallouant des ressources vers l’investissement en infrastructure. La hausse de celui-ci devrait alors créer des incitations fortes sur l’investissement privé. Le financement du programme étant assuré par la hausse des impôts, l’impact sur le déficit public sera limité et le profil de la dette publique ne sera que légèrement haussier, pas forcément très différent de celui qui est projeté aujourd’hui par les autorités américaines.
Le programme de Donald Trump ne part pas du même postulat sur l’état de l’économie. Il y a deux principes majeurs: le premier est de réduire fortement la fiscalité des ménages et des entreprises afin de relancer la demande interne; le second est de redonner aux Etats-Unis la puissance et l’indépendance qui les caractérisaient par le passé. Cela passe par une dénonciation d’engagements et de traités commerciaux, d’engagements politiques internationaux et par la mise en place d’un cadre plus protectionniste avec une hausse significative des droits de douane notamment vis-à-vis de la Chine. L’objectif est ainsi d’alimenter le marché intérieur tout en accentuant l’indépendance des Etats-Unis vis-à-vis du reste du monde.
La conjonction des deux principes majeurs évoqués a des effets contradictoires qui toucheront l’ensemble des citoyens américains. La relance de la demande via la baisse des impôts et des dépenses d’infrastructure se traduira par une hausse des importations puisque les américains depuis très longtemps maintenant sont dépendants du reste du monde et notamment de l’Asie et de la Chine pour leurs biens manufacturés. Le déficit extérieur devrait s’accroître. Mais dans le même temps, le souhait de renouveler l’indépendance des Etats-Unis se traduirait par un choc négatif sur le commerce mondial avec un risque de rétorsion qui viendrait de l’ensemble des pays lésés par cette nouvelle politique américaine. Dès lors on peut anticiper des tensions sur les droits de douane et une contraction du commerce mondial. Tous les acteurs de l’économie américaine seraient touchés. Les entreprises qui exportent mais aussi toutes celles qui en dépendent alors que l’ensemble des américains seraient affectés par les mesures de rétorsions. On ne peut pas exclure dans ce cadre une sérieuse inflexion à la baisse de l’activité. La conséquence d’une croissance lente voire négative et de fortes baisses d’impôts est une hausse du déficit public et un accroissement sans précédent de la dette publique.
Conséquences globales
Le choix de l’un ou l’autre candidat aura des conséquences durables et très différentes sur le profil de l’économie. Pour le reste du monde l’impact aussi sera de nature opposée. Dans le cas d’une élection démocrate, on sait Clinton non opposée au libre-échange sans en être une zélatrice (notamment du TTIP). En d’autres termes, elle ne prendra pas de mesures protectionnistes mais ne poussera pas à accentuer les accords commerciaux entre pays ou zone. Sur le plan politique, le rôle des Etats-Unis dans l’équilibre mondial sera poursuivi.
Si c’est le candidat républicain qui est élu alors les choses ont une autre allure. Le choc sur le commerce mondial affectera tous les participants à l’économie globale tirant l’activité vers le bas. Personne n’échappera à ce choc négatif, notamment pas les chinois. Les canadiens et les mexicains qui ont des échanges très denses avec les USA seraient aussi pénalisés. L’Europe subirait ce changement radical et serait pénalisée. L’autre point à souligner est que le candidat républicain ne souhaite plus voir les Etats-Unis garantir la sécurité pour tous contrairement à ce qui est fait depuis la seconde guerre mondiale par les américains (remise en cause de l’OTAN). Le risque est ainsi de créer des conditions de défiance qui ne sont jamais favorables à la croissance.
En outre, sur l’impact globale des politiques mises en oeuvre, Hillary Clinton est en faveur de l’accord trouvé à la COP21 en souhaitant développer les investissements dans les énergies alternatives.
Le candidat républicain remet en cause cet accord global sur le climat souhaitant écarter les limites qui ont pu être établi sur les émissions et le contrôle du CO2.
Vis à vis de la Federal Reserve
L’attitude des deux candidats est opposée également en ce qui concerne la Federal Reserve. Peu de changements à attendre du côté des démocrates. La candidate garantira l’indépendance de la banque centrale. Janet Yellen pourra continuer, sans encombre, la gestion de la politique monétaire américaine.
Pour le candidat républicain, l’approche est radicalement différente. Cela a pu se constater à la lecture des critiques innombrables sur la stratégie mise en œuvre par Janet Yellen. Il me semble que le risque ici est de tenter de réduire l’indépendance de la Fed, soit de façon autoritaire, en changeant les textes, soit en reprenant un souhait des républicains du congrès visant à réduire les marges de manœuvre de la banque centrale. L’idée est d’obliger la Fed à suivre des règles précises dans la gestion de sa politique monétaire. La Fed pourrait toujours être indépendante dans les textes institutionnels, elle ne le serait plus dans les faits.
Le 8 novembre, les américains vont faire un choix très engageant car les programmes des deux candidats n’ont que très peu de points communs. Le choix portera soit sur la continuité avec un cadre de référence cohérent soit sur l’adhésion à une option aventureuse qui serait pénalisante pour tous y compris les américains.