L’épargne des ménages a augmenté de façon spectaculaire pendant la crise sanitaire au risque, en réduisant la demande, de freiner la reprise de l’activité et de l’emploi. Chacun se rassure en épargnant mais crée le risque de provoquer une récession (paradoxe de l’épargne). Le risque sanitaire accru relance la machine à épargner, reportant l’éventuel effet positif du plan de relance.

L’épargne est au cœur de la politique économique. Depuis le début de la crise sanitaire, les ménages ont accumulé de l’épargne à la fois parce qu’en raison du confinement, ils ne pouvaient pas dépenser les revenus qu’ils touchaient mais aussi par précaution en raison de l’incertitude engendrée par celle-ci. C’est un sujet majeur en France et ailleurs. Les taux d’épargne ont explosé à la hausse au deuxième trimestre. En zone Euro, en Allemagne et en France sur le graphe, on constate la particularité du printemps. Ces chiffres baisseront néanmoins rapidement car la situation a changé avec la sortie du confinement.

Des comportements qui s’inscrivent dans la durée

La lecture de la collecte cumulée du Livret A et du Livret de Développement Durable et Solidaire montre que ce comportement d’épargne ne s’est pas arrêté avec le confinement. En 2019, la collecte cumulée était de 19.3 Mds d’euros à la fin du mois de septembre, elle est de 32.7 Mds en 2020. Les ménages n’ont pas liquidé leur épargne après la fin du confinement.

Cette épargne, tous les français ne peuvent se la permettre. Une note du Conseil d’Analyse Economique indiquait que cette épargne et cette capacité d’épargne était l’apanage des revenus les plus élevés, ceux qui dépensent le plus en service et qui sont contraints avec les mesures sanitaires de dépenser moins.

Un dernier point à souligner, les ménages européens ont une préférence pour l’épargne en ce moment. Les enquêtes menées montrent que la volonté d’épargner est au plus haut historique.
Les ménages s’interrogent sur l’issue de la crise sanitaire et sur les conséquences qu’elle aura sur le marché du travail et sur l’emploi de chacun. Tant que ces incertitudes ne seront pas levées, la volonté d’épargner restera forte.

Le rôle de la politique économique

Cette épargne supplémentaire des ménages est un frein à la reprise de l’activité car la demande adressée aux entreprises est moins forte. Par rapport à la même situation que l’an dernier, les ménages épargnent plus et consomment moins. Lorsque la situation macroéconomique est fragile, le rôle de la politique économique est de tout faire pour remettre cette épargne dans le circuit.

Par le passé, des grands emprunts avaient été émis pour la capter, Keynes suggérait même de créer un impôt spécifique sur les britanniques au début de la guerre afin de faciliter le financement de l’effort de guerre et éponger cette épargne en excès.

La politique économique doit permettre de réduire l’incertitude en posant des jalons sur la façon dont l’économie pourrait évoluer. Le plan français, par exemple, va dans ce sens en mettant en avant la nécessité d’emplois non-délocalisables dans la transition énergétique, les emplois jeunes, le prolongement du chômage partiel et les efforts de formation notamment

Le retour du risque sanitaire

En France, cette réduction d’incertitude était sur la bonne voie puisque la collecte du Livret A en septembre était comparable à celle de septembre 2019. Cependant, le risque sanitaire s’est franchement accéléré et les mesures restrictives vont contraindre les ménages à moins de dépenses tout en renouvelant le risque sur l’activité et l’emploi. L’épargne va rester élevée et pourrait s’accroître avec la durée de la crise. Chacun sera rassurer d’avoir davantage d’épargne mais à l’échelle macroéconomique, la demande plus réduite pénalisera la production et l’emploi. Le défi de la politique économique sera de maintenir le cap pour que lorsque le risque sanitaire se réduira, les ménages retrouvent confiance et réduisent leur épargne. Le défi est fort car entretemps, l’économie pourrait retomber en récession.

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