Pour être économiste, il faut être théoricien, statisticien, historien et intellectuel. Il faut se nourrir du monde qui est pour construire le monde qui vient.
On demande beaucoup aux économistes car l’économie, par construction, est une synthèse de tous ces éléments.
Il faut être capable de déterminer le cadre dans lequel on se situe et de connaître le point ou l’on se place à un moment donné. Il faut aussi être capable de rendre compte de l’évolution à venir du monde en fonction des contraintes auquel il aura à faire face.
Cette partie est particulièrement nécessaire aujourd’hui où, après une quarantaine d’années de globalisation, les rapports de force changent, les contraintes climatiques s’accentuent et la technologie bouleverse les positions acquises.
J’évoque cette question après avoir lu le débat autour de l’état de la macroéconomie organisé par “Le Grand Continent”. Olivier Blanchard et Barry Eichengreen évaluent la situation sous la baguette de Gillian Tett du Financial Times.
Olivier Blanchard est depuis de très nombreuses années un macroéconomiste connu et reconnu. Il était chef économiste du FMI au moment de la crise de 2008. Barry Eichengreen est un brillant économiste sur les questions relatives aux mouvements de capitaux et au taux de change.
Ces deux auteurs ont construit la macroéconomie dans la façon dont elle se pense et dont elle est enseignée. J’ai lu ce débat avec enthousiasme étant un lecteur de longue date des deux auteurs et notamment de Blanchard.
Pourtant, cette discussion n’éclaire pas les interrogations que l’on peut avoir. Blanchard indique qu’il est optimiste en raison d’un solide corpus de connaissances et d’une capacité à faire les bons ajustements grâce à de nouvelles idées et à l’évolution du monde.
« Je ne pense pas que nous ayons besoin d’un changement de paradigme. Il faut de l’évolution, pas de révolution. »
On a un corpus solide de connaissance mais on se retrouve nu face à une courbe de Phillips qui ne fonctionne plus ou dans l’incapacité de donner les bons conseils face à la stagnation de la productivité en Europe alors que la technologie change la donne.
La macroéconomie est face à la nécessité d’une double réflexion. Comment converger vers la neutralité carbone ? Autrement dit, comment définir et calibrer une trajectoire qui converge vers un point dans le futur. Comment construire ce cadre est en se reposant sur quel corpus ? Croissance ou décroissance ?
La seconde réflexion porte sur la façon dont l’économie peut fonctionner si l’on se passe grandement des énergies fossiles. Le développement du monde a été consubstantiel à l’utilisation intensive du charbon puis du pétrole et du gaz. L’économie peut elle exister sans ces énergies ?
Ce sont des interrogations et des éléments de réponses que l’on peut souhaiter d’aussi brillants économistes
Source: Groupe d’études géopolitiques Gillian Tett Olivier Blanchard Barry Eichengreen Lien https://bit.ly/4akkFHJ