En 2020, lors de la réunion de Jackson Hole, Jay Powell avait annoncé le changement de l’objectif de la politique monétaire américaine. Désormais, la Fed avait pour cible un taux d’inflation de 2% mais dans le long terme, n’obligeant plus la Fed à intervenir précipitamment pour corriger une évolution des prix au-dessus ou au-dessous de 2%.
Ce changement dans le mode de fonctionnement de la politique monétaire renforce la crédibilité de la banque centrale. Elle a une stratégie qu’elle applique, qui est la colonne vertébrale de son action. Pendant sa mise en œuvre, l’inflation peut fluctuer mais ce n’est pas grave puisque les investisseurs sont persuadés que la Fed tiendra son objectif de 2% dans le long terme. Ce cadre a très bien fonctionné depuis longtemps tant que le cadre de l’économie évoluait peu.
C’est cette crédibilité qui est remise en cause, cette capacité à converger naturellement vers 2 % dans le long terme. C’est ce qui provoque les errements des investisseurs sur les marchés financiers.
Il y a deux dimensions.
La première est de savoir qui, in fine, décide in fine lors des réunions du FOMC, le comité de politique monétaire de la Federal Reserve.
Par le passé, Greenspan, Bernanke ou Yellen mettaient tout le monde d’accord et chaque membre du comité se ralliait à son panache blanc. Bernanke ou Yellen ont parfois été hésitants sur la réponse à donner aux évolutions conjoncturelles mais il y avait toujours une rationalité un peu à l’image de ce que disait Keynes: “Quand les faits changent, je change d’avis”.
Powell donne le sentiment d’hésiter à choisir le bon modèle lorsque les faits changent. En février dernier il parlait de désinflation mais est revenu sur le terme très vite sous la pression des autres membres du comité.
Qui tient la barre ? Cela parait moins bien défini que dans le passé. De ce point de vue, la banque centrale a beaucoup perdu avec le départ de Lael Brainard dont l’approche ressemblait à celle des anciens présidents de l’institution.
L’autre point est que le FOMC suggère que l’inflation va être au-delà de la cible plus longtemps qu’anticipé et que la convergence vers 2% pourrait être coûteuse pour l’activité et l’emploi. C’est ce qui a suggéré à Jason Furman d’inciter la Fed à changer sa cible d’inflation pour la passer à 3% dans le long terme. L’économie se transforme et le niveau de 2% peut désormais apparaître trop contraignant. La Fed définit sa crédibilité par le respect de sa cible. Est elle aussi indiscutable que par le passé ?
A Jackson Hole, Jay Powell doit éclairer ces points. Quel est le modèle que la Fed a en tête et avec quel niveau de taux d’inflation est il compatible ? Tant que les réponses resteront évasives le niveau des taux d’intérêt sera élevé et la volatilité sera forte. La crédibilité retrouvée de la Fed permettrait de réduire le cout macroéconomique de l’épisode que nous connaissons au moment où il faut bouleverser l’économie pour l’adapter à un cadre nouveau.