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L’accord entre la Grèce et la zone Euro pose spontanément quelques questions parmi d’autres
La première est celle de la croissance: A quel moment dans le futur peut on imaginer un retour de la croissance en Grèce?
Ce ne sont pas les quelques mesures sur l’ouverture des magasins le dimanche, la libéralisation des pharmacies, des boulangeries et la réduction des professions protégées qui vont relancer la croissance.
Les objectifs qui ont été dévoilés par Tsipras, jeudi dernier, doivent conduire à une convergence du solde budgétaire primaire vers le niveau de 3.5% du PIB en 2018. Cette mesure n’est pas remise en cause mais sera certainement au cœur des discussions lorsque commenceront les négociations pour le 3ème plan de sauvetage.
En 2014, le relâchement de l’austérité avait permis de retrouver une allure plus robuste sur la croissance et l’emploi. L’incertitude qui a prévalu depuis l’arrivée de Syriza a infléchi cette tendance. Mais les effets de la hausse de la TVA et de la baisse des retraites remettent l’austérité au goût du jour et vont pénaliser la croissance.
A moyen terme, la réforme des retraites ira aussi certainement dans ce sens. Il faudra caler le profil des retraites sur la capacité de l’économie à générer des revenus. Or au regard du profil du PIB (baisse de 26% depuis 2009) ces revenus et les pensions qui y sont attachés seront plus réduits.
On a vu, depuis 2013, en Espagne et au Royaume Uni que le relâchement de l’austérité menait à la croissance, on l’a vu aussi en Grèce en 2014. C’est comme cela qu’il faut interpréter le retour de la croissance en Espagne et au Royaume Uni, la Grèce après l’accord n’en prend pas le chemin. Il est probable que le profil de la croissance sera médiocre jusqu’en 2018.
Le retour de l’austérité va se traduire par une performance économique désastreuse et le maintien d’un taux de chômage très élevé alors que fin 2014 il y avait un changement. Alexis Tsipras parle d’un plan de relance susceptible de contrecarrer les mesures d’austérité. On attendra qu’il le présente pour le valider.
Cela pose deux questions:
La première est que la convergence vers un solde budgétaire primaire de 3.5% du PIB en 2018 et une croissance médiocre ne permettront pas spontanément une amélioration du ratio dette publique sur PIB. La question de la réduction de la dette et de sa restructuration va vite revenir sur la table
L’autre aspect est le chômage qui va rester très élevé, créant du mécontentement notamment en raison du revirement de Tsipras. Cela pourrait engendre du désordre social.
La deuxième question est celle de la disparition de l’aléa moral.
Les mesures prises à l’encontre de la Grèce écartent tout risque d’aléa moral au sein de la zone Euro. Aucun pays ne souhaitera prendre une autre route que celle qui vient d’être tracée sauf à subir une salve de contraintes similaire à celle subie par la Grèce.
Cela pose une autre question: dans la construction de la zone Euro, il est nécessaire d’avoir une dimension politique à côté de la banque centrale. C’est l’une des composantes d’une Zone Monétaire Optimale. Aux USA ou en Allemagne le budget fédéral permet de redistribuer et d’assouplir les contraintes qui pèsent sur les Etats locaux et sur les Länder. Le système n’est viable que parce que le budget fédéral redistribue des ressources entre les riches et les pauvres.
Si la rigueur budgétaire s’applique à chaque pays de la zone Euro, qu’est ce qui permettra la redistribution? Comment seront amortis les chocs asymétriques, ceux qui ne concernent qu’un seul pays?
La rigueur budgétaire, qui sous-tend les mesures, obligerait tous les pays de la zone Euro à aller au même rythme. Comme il n’y aura qu’une seule politique monétaire, il ne pourra pas franchement y avoir d’ajustement. C’était déjà le cas mais les mesures prises ici traduisent bien la volonté allemande de mettre tous les budgets d’équerre pour espérer échapper à un transfert de souveraineté budgétaire. Il n’y aura pas de dynamique budgétaire centralisée, c’est cela message et donc pas d’Eurobonds.
On voit bien que la zone Euro même dans un système plus souple mais peu redistributif n’a pas bien fonctionné. C’est aussi une des raisons de la crise en zone Euro. Que se passera-t-il si les contraintes sont plus rigoureuses? Exclure à moyen terme ceux qui ne tiennent pas la distance? On ne voudrait pas le penser.
La dernière réflexion est celle qui s’est traduit par la référence qui a été faite à plusieurs reprises pendant les négociations et portant sur l’opinion public national. Les engagements vis à vis de la Grèce ont semblé avoir, pour plusieurs délégations, plus d’importance pour l’équilibre local d’un gouvernement vis à vis de ses électeurs que pour l’équilibre global de l’ensemble de la zone? Est ce tenable à moyen terme? On peut en douter. Cette hiérarchie a toujours plus ou moins existé mais là le sentiment est que l’équilibre global n’est pas évoqué.
Je n’ai pas entendu de discours sur l’Europe comme construction politique nécessaire durant toutes ces négociations ou même après le référendum grec. On aurait pu imaginer Angela Merkel, François Hollande ou Donald Tusk inscrire la négociation actuelle dans un cadre plus large. Cela n’a pas été le cas. L’Europe est elle trop évidente pour qu’on la mentionne? Cela va peut être de soi finalement que de ne pas la mentionner mais l’on a perçu des forces centrifuges qui fragilisent l’ensemble de la construction. Ces forces provenaient de certains négociateurs et cela n’est pas de bon aloi.