Verbatim de ma chronique
La situation globale sur les marchés et notamment sur les marchés émergents est confuse avec parfois des ajustements très brutaux.
On a pu l’observer cette nuit avec la très forte hausse du taux d’intérêt de référence de la banque centrale de Russie. Il est passé de 10.5% à 17% en réponse à une chute supplémentaire du rouble. D’une manière générale on a observé ces derniers jours des mouvements forts sur les marchés notamment sur la dette émergente et les devises émergentes. Les marchés boursiers ont été bousculés aussi.
Il me semble qu’il y a trois éléments d’explication à cet ajustement spectaculaire.
Le premier est la baisse du prix du pétrole.
Alors que cela sera un soutien fort pour la croissance des pays développés en 2015, notamment en Europe, c’est actuellement une source de faiblesse majeure pour de nombreux pays émergents. Cela reflète notamment une dynamique globale de l’activité très limitée.
A court terme, les pays producteurs sont pénalisés et le mouvement constaté sur la Russie traduit bien cette situation. Le profond repli du prix du pétrole implique une baisse significative des recettes à l’exportation, une économie qui perd son attrait, des sorties de capitaux et une monnaie qui baisse. La situation se complique encore davantage car la baisse de la monnaie se traduit par une importation d’inflation. La banque centrale est dès lors tentée de remonter rapidement ses taux d’intérêt.
Au sein des pays développés et notamment aux USA, la baisse du prix de l’or noir se constate d’abord sur les marchés via la remise en cause de projets d’investissement dans le secteur pétrolier. L’impact positif sur la consommation et l’investissement dans d’autres secteurs seront ressentis plus tard et ne contrebalancent pas les interrogations sur ces projets devenus plus incertains.
Le deuxième point est la fragilité de l’activité dans les pays émergents.
Depuis plusieurs mois les indices du secteur manufacturier dans les enquêtes Markit sont fragiles. L’indice des pays émergents est juste un peu au-dessus du seuil de 50 et il en est de même pour l’indice BRIC. Le repli supplémentaire en décembre de l’indice PMI/Markit/HSBC en Chine à 49.5 ne va pas contrarier cette tendance.
L’activité réduite et un prix du pétrole qui recule rapidement sont des ingrédients de fragilité des marchés émergents.
Mais il faut rajouter, 3ème élément, l’incertitude créée par la réunion de la Federal Reserve américaine de mardi/mercredi et l’éventuel signal qui sera donné sur l’orientation des taux d’intérêt avec le maintien ou le retrait de la clause sur la “période considérable” avant la remontée des taux d’intérêt. C’est une source de fragilité supplémentaire ces derniers jours car la Fed semble plus décidé à infléchir sa stratégie. C’est une source génératrice de transferts de capitaux vers les Etats-Unis et au détriment des pays émergents (on se souvient de l’impact sur les flux de capitaux de la déclaration de Bernanke au Congrès le 22 mai 2013 quant à la normalisation de la politique monétaire US)
La dynamique peu robuste constatée actuellement tient à ses trois éléments. Le dernier aspect sur la politique de la Fed va être vite levé mais les deux autres facteurs s’inscrivent dans la durée. En creux, cela pourrait se traduire par un changement du rapport de force entre les pays émergents et les pays industrialisés au bénéfice de ces derniers. Ceux-ci vont retrouver de la vigueur par la baisse du prix de l’énergie.
L’année 2015 sera alors peut être celle des pays développés.