Verbatim de ma chronique hebdo
Plusieurs points à retenir cette semaine
Le premier est la confusion qui règne autour de la Grèce. La négociation commence entre le nouveau gouvernement, les pays européens et institutions sur le nouveau positionnement et les besoins de la Grèce.. Cela sera forcément un peu long et complexe à suivre car plusieurs approches pas forcément compatibles sont mises en avant et cela participe à la confusion
Il y a d’abord l’approche économique montrant à la fois la baisse de l’activité depuis 2008, la déflation mais aussi les efforts accomplis pour réduire les déséquilibres budgétaire et de compte courant. Sur ce point, les grecs ont subi un choc fort mais en 2014 la croissance sera positive en Grèce pour la première fois depuis 2007. Au regard de la rupture constatée, la reprise est encore bien modeste et ne fera pas tressaillir le ratio dette publique sur PIB (dont la dégradation tient bien davantage à la baisse du PIB qu’à la hausse de la dette)
Il y a une deuxième approche reposant sur les engagements pris par les gouvernements précédents. Ils lient le support financier apportés à la Grèce notamment via la troïka aux résultats obtenus. C’est ce point qui est au cœur des discussions du moment car le programme d’aide doit être renouvelé fin février. Un désaccord et la Grèce risque de se retrouver sans financement. Son système bancaire pourrait alors ne plus avoir la possibilité de recourir aux financements de la BCE. C’est pour cela que ce qui se joue est majeur. Un désaccord sans retour pourrait se traduire par la sortie de la Grèce de la zone Euro. Qui aujourd’hui est prêt à prendre ce risque tout en imaginant que la construction de la zone Euro ne serait pas affectée?
Il y a une troisième composante qui est le programme de Syriza. Il a été construit pour compenser l’impact des chocs subis par les grecs notamment sur le salaire minimum, l’emploi dans la fonction publique ou encore le coût de l’électricité.
Il y a une quatrième interrogation qui est l’interrogation sur les règles mises en œuvre pour gérer la situation de la Grèce avec notamment une interrogation sur l’efficacité et l’impact des politiques d’austérité. La Grèce est alors le symbole d’une analyse plus large.
Il y a aussi un point de vue qui considère que seules les réformes structurelles seront efficaces à moyen terme et que la croissance ne repartira qu’à ce prix. Cela implique que la purge n’est pas achevée. C’est le point de vue souvent rencontré en Allemagne (Volker Kauder ce week end dans Der Spiegel)
Il y a enfin une sixième source d’analyse sur la Grèce qui est celle d’une autre voie possible au sein de l’Europe et notamment au sein de la zone Euro. Cette analyse est plus politique, prenant la Grèce comme catalyseur de la rupture politique. Elle doit être prise en compte car souvent elle ignore une grande partie des éléments énoncés plus haut.
La perception de la Grèce aujourd’hui c’est au moins ces 6 éléments. Les analyses, les arguments ne sont pas toujours compatibles et c’est pourquoi la situation peut paraitre confuse. Mais ces points de vue devront être pris en compte pour appréhender la négociation qui s’ouvre.
La question sur la négociation part d’une situation contrainte: la Grèce ne veut pas sortir de la zone Euro et les autres pays membres ne veulent pas non prendre ce risque. Chacun va vouloir négocier en tirant la négociation sur son terrain. Je pense qu’un accord pourra être trouvé où alors c’est un jeu dans lequel tous les participants seraient perdants. S’il y avait acceptation du risque d’éclatement alors cela signifierait que la dynamique politique et la volonté de cohésion mises en avant par Draghi à Londres le 26 juillet 2012 pour justifier la construction européenne ne serait plus un support fort. L’instrument, l’euro, aurait alors dépassé la volonté politique. Espérons que l’on n’en arrivera pas à ce stade..
Le feuilleton est loin d’être fini.
Le second point à retenir cette semaine est le repli encore plus marqué des prix en zone Euro avec un chiffre d’inflation de -0.6% en janvier. Certes l’énergie a une contribution qui devient encore plus négative (-1%), c’était attendu après la baisse continue du prix du pétrole. Mais on constate que les services et les biens hors alimentaires et énergie continuent de s’infléchir encore.
Le risque de déflation n’est toujours pas écarté et le QE de la BCE est franchement souhaitable pour peser encore davantage sur l’activité et infléchir à la hausse les anticipations d’inflation
Le troisième point est le ralentissement de la croissance américaine à 2.6% au dernier trimestre de 2014 après 5% au troisième. Sur l’ensemble de l’année la croissance est de 2.4%. L’acquis pour 2015 est déjà de 1.4%.
De façon plus générale, la tendance de l’économie depuis la reprise est de 2.4% (courbe rouge sur le graphe). C’est moins que ce qui était généralement observé avant la crise à 2.7%.
Au dernier trimestre, la consommation a bien tenu mais l’investissement a ralenti ainsi que les exportations. Pour l’instant pas d’alerte mais une attention notamment sur l’investissement.
Si la croissance tendancielle est de 2.4%, la Fed n’a pas encore la nécessité de relever ses taux d’intérêt. Lors de sa réunion du mois de janvier, elle a laissé le suspens quant à un possible relèvement de ses taux autour de l’été 2015.
Je pense qu’en raison de la faible inflation qui caractérise l’économie américaine et la hausse rapide du dollar depuis l’été 2014 il n’y a pas de raisons pour la Fed de relever ses taux. La hausse du dollar fait le travail. On peut imaginer que la question du relèvement des taux passera rapidement sur 2016 au mieux
Dernier point avec une consommation de biens en France qui s’améliore. Au dernier trimestre, la consommation hors énergie a progressé pour revenir au niveau d’avril 2011. La dynamique serait elle en train de changer à la hausse ? A voir mais la baisse du prix de l’énergie pourrait amplifier encore davantage ce phénomène et redonner un souffle plus fort à la consommation. Cela aurait un impact fort sur la croissance.
Pour la semaine qui s’ouvre, on observera les enquêtes PMI et ISM pour le secteur manufacturier lundi et les services mercredi. On sera aussi très attentif à l’évolution de l’emploi américain vendredi et aux commandes à l’industrie allemande mercredi. Si aucune décision n’est attendu du coté de la banque d’Angleterre, on ne peut pas exclure une baisse des taux en Australie mardi. Les politiques monétaires deviennent plus accommodantes partout.