7 points à retenir dans la conjoncture cette semaine
Point #1 – Accord entre la Grande Bretagne et l’Union Européenne
Un accord a été signé par David Cameron et l’Union Européenne afin d’aménager des conditions spéciales aux britanniques au sein de l’UE. Cet aménagement permettra à David Cameron de soutenir le maintien de la Grande Bretagne au sein de l’UE mais la tâche sera complexe puisqu’il n’emporte pas l’adhésion de son gouvernement. Plusieurs membres de celui-ci et Boris Johnson le très médiatique maire de Londres voteront pour la sortie du Royaume Uni.
Le principal point à retenirest que dans cet accord l’Union Européenne accepte que le Royaume Uni puisse écarter la clause selon laquelle il doit y avoir convergence des institutions et des politiques au sein de l’Union. Les britanniques pourront aussi utiliser une procédure de sauvegarde au cas où la zone Euro voterait une régulation financière qui serait perçue comme pénalisant le Royaume Uni.
En d’autres termes, le RU ne prend que ce qui l’intéresse dans l’UE à savoir l’appartenance au marché unique et notamment au marché unique des services. L’Union Européenne est le premier partenaire du Royaume Uni, il serait donc pénalisant, outre-Manche, de mettre des grains de sable dans ce rouage.
Le premier tableau montre la source des enjeux sur l’appartenance de la Grande Bretagne à l’UE. La partie droite montre les bénéfices de l’accord et ce sont des points qui n’ont pas été touchés. La partie gauche est ce qui a été négocié tant sur la question de l’appartenance à l’UE et aux progrès vers la convergence que sur la question de l’immigration.
L’autre point est de s’interroger sur la volonté des britanniques de faire partie de l’Union Européenne. Le graphe ci-dessous suggère que le RU s’était déjà exonéré des institutions visant à l’intégration des pays de l’UE
Le Royaume Uni serait certainement pénalisé par sa sortie de l’UE, ne serait-ce que parce que les points positifs du premier tableau le seraient nettement moins. La disparition des dispositions du marché unique alors que l’UE est le principal partenaire des britanniques serait préjudiciable outre Manche.
Néanmoins, on peut retourner la question du référendum du 23 juin. Pour les européens est-il toujours de l’intérêt des autres membres de l’UE d’accepter le maintien du RU dans l’Union? Depuis Margaret Thatcher le jeu est asymétrique et les règles du jeu systématiquement rendues incertaines et floues par le Royaume Uni. Doit on continuer de la sorte et créer de l’incertitude sur la construction européenne?
Point #2 – Les minutes de la BCE ne donnent pas de signaux sur les changements de politique en mars.
Par rapport à la conférence de presse de Mario Draghi du 21 janvier, il n’y a pas, dans les minutes publiées jeudi dernier, de précision sur les mesures qui pourraient être mises en œuvre en mars par la BCE.
On notera cependant que la Banque Centrale Européenne est peut être en train de modifier la forme de sa cible d’inflation. Jusqu’à présent la cible d’inflation est de 2% mais un peu en-dessous. Dans les minutes, il a été publié l’idée, sur la remarque d’un participant, que l’inflation puisse aller temporairement au-dessus de cette cible après une longue période d’inflation très en-dessous de 2%. C’est juste une remarque mais cela pourrait aussi traduire une plus grande flexibilité sur la cible afin de modifier les anticipations d’inflation et faciliter la convergence vers un taux d’inflation plus élevé.
Point #3 – La Fed s’interroge
Dans les minutes de sa réunion des 26 et 27 janvier, la Fed montre ses hésitations quant à la dynamique du cycle économique.
L’idée d’un retour vers un cycle normalisée qui transparaissait lors de la réunion de décembre, lorsque la banque centrale américaine avait remonté ses taux d’intérêt, s’est estompée. En conséquence le beau scénario d’un retour vers une allure normalisée du cycle est écartée. On pouvait lire ces éléments dans le communiqué de presse à l’issue de la réunion, la lecture des minutes les confirme. La Fed est beaucoup plus hésitante quant à la vitesse à laquelle elle remontera ses taux d’intérêt.
Point #4 – Dynamique industrielle
Malgré le rebond observé en janvier, la production industrielle est toujours fragile aux USA. La hausse de +0.9% vient après 3 mois consécutifs de repli de l’indice (-3.25% en taux annualisé au T4). Sur la partie manufacturière, la progression de 0.5% vient après une stagnation au dernier trimestre 2015 (+0.08% en taux annualisé). On ne peut pas parler de reprise ni de changement de tendance. Il est beaucoup trop tôt.
On voit d’ailleurs que la faible dynamique industrielle n’est pas l’apanage des Etats-Unis. Partout le profil est moins robuste qu’il y a quelques mois. C’est une conséquence d’un commerce mondial qui ne décolle toujours pas et qui plus récemment s’est infléchi (voir ici)
Si l’on regarde la dynamique du secteur manufacturier le profil est similaire même si aux USA l’impact du secteur de l’énergie disparait. Cela ne donne pas pour autant une allure très robuste à l’indicateur manufacturier américain. On notera cependant sur le graphique ci-dessous qu’au Royaume Uni, l’indice manufacturier est bien plus robuste que l’indice industriel. Le ralentissement de la production pétrolière se lit dans l’indice industriel mais pas dans l’indice manufacturier. L’Espagne a aussi une dynamique manufacturière plus solide.
Aux Etats-Unis, le taux d’utilisation des capacités de production s’est accru en janvier. Cela ne remet pas en cause l’idée d’un ralentissement de l’économie américaine.
Toujours aux USA, en dépit du rebond observé en février, les indices de la Fed de New-York (Empire State Index) et de la Fed de Philadelphie sont toujours en territoire indiquant une contraction ou une progression limitée de l’activité.
Point #5 – La situation reste robuste au Royaume Uni
La hausse de l’emploi en novembre et la progression rapide des ventes de détail en janvier reflète une dynamique toujours solide de l’économie britannique. On le voit sur le graphe ci-dessous.
Néanmoins cela ne suffit pas pour créer des tensions nominales au sein de l’économie britannique. La dynamique des salaires reste limitée et s’infléchit même alors que le taux d’inflation n’est qu’à 0.3%.
Point#6 – Le compte courant de la zone Euro au plus haut
Le solde de compte courant de la zone Euro (mesure de ses relations avec le reste du monde) est un surplus de 314 Mds d’euros en 2015. C’est l’excédent le plus important depuis la création de la zone.
Cela traduit un excès d’épargne qui à mon sens est excessif car cette épargne n’alimente pas la demande adressée aux entreprises, limitant ainsi l’ampleur de la reprise. C’est ici que la politique budgétaire doit intervenir.
Point #7 – L’inflation s’est accélérée aux USA en Janvier
Le taux d’inflation s’est inscrit à 1.3% en janvier et le taux sous-jacent à 2.2%. La contribution de l’inflation sous-jacente (sa variation multipliée par son poids dans l’indice des prix) est de 1.7% en hausse de 0.4% sur un an. Cela s’explique principalement par le logement hors énergie (0.1%), l’automobile (0.08%), l’éducation et la communication (0.06%), l’ameublement (0.05%) et les loisirs (0.04%).
Cette hausse est significative mais ce n’est pas celle de l’indice suivi par la Fed (le taux sous-jacent y sera plus proche de 1.6%) et que dans le même temps les anticipations d’inflation des ménages et sur les marchés s’effondrent (voir ici)
Autres points de la semaine
L’inflation chinoise s’est inscrite à 1.8%, contre 1.6% en décembre, principalement en raison de la hausse des prix alimentaires. L’indice des prix de production recule de 5.3% c’est son 43ème mois de repli.
L’indice ZEW en Allemagne se replie en février mais reste dans une zone compatible avec une croissance de l’activité. Néanmoins les deux composantes (conditions actuelles et anticipations) se replient par rapport à JanvierL’indice des prix en France est en hausse de 0.2% sur un an.
Les mises en chantier aux USA se sont repliés en janvier sous l’impulsion principalement de la construction d’immeubles qui ne progresse plus depuis mai
Pour la semaine à venir
L’élément clé sera l’ensemble des enquêtes qui seront publiés pour le mois de février: lundi pour les indices flash publiés par Markit pour la zone Euro (y compris France et Allemagne) et les Etats-Unis; mardi pour l’indice du cycle des affaires de l’INSEE et l’IFO allemand et jeudi pour les indices italiens (très surveillés au regard de leur inflexion récente)
Deuxième estimation des chiffres de croissance du quatrième trimestre 2015: Allemagne (mardi), Espagne et Royaume Uni (jeudi) et France et USA (vendredi)
Jeudi il y aura la publication des commandes de biens durables aux USA avec sa composante liée aux biens d’équipement (pour son lien avec l’investissement)
Jeudi aussi l’évolution détaillée des prix en janvier en zone euro
Mercredi en France il y aura la confiance des consommateurs pour février, les inscrits à Pôle emploi pour janvier. Vendredi il y aura les dépenses des consommateurs en janvier et l’indice des prix de février (estimation avancée)
Vendredi enfin sera publié l’indice des prix suivi par la Fed
Bonne semaine