Au retour de vacances il est toujours nécessaire de se remettre les indicateurs à l’esprit.
Je vous propose une série de graphes avec un commentaire rapide pour reprendre mes publications sur ce blog.
Point 1 – Une croissance décevante au 2ème trimestre aux USA et en France
En France, le PIB a marginalement reculé au 2ème trimestre (-0.04% soit -0.2% en taux annualisé) et aux USA sa progression n’a été que de 0.3% soit 1.2% en taux annualisé. Pour la France c’est un coup d’arrêt lié à une dynamique interne privée qui s’est stoppée. Sa contribution à la croissance du PIB (en taux annualisé) passe de 3.6% au cours des trois premiers mois de 2016 à -0.1% au cours du printemps. La consommation s’est effondrée avec une contribution qui est passée de 2.5% à 0% et l’investissement des entreprises a chuté passant d’une contribution de +1.1% à -0.1%.
La prévision de 1.5% pour 2016 par le gouvernement est à risque car il faudrait 0.55% (soit 2.2% en taux annualisé) au 3ème et au 4ème trimestre pour atteindre cet objectif. On ne voit pas spontanément ce qui permettrait à l’économie française de se caler deux trimestres consécutivement au dessus de sa croissance potentielle. (Pour plus de détails sur la France voir ici et sur les USA voir ici)
Aux USA, la consommation a nettement rebondi mais l’investissement a reculé de façon significative. Ce que l’on observe aux USA c’est le changement de tendance depuis le 3ème trimestre 2015. Depuis cette date la dynamique est moins robuste. Le chiffre de croissance en 2016 devrait être en net retrait par rapport aux chiffres de 2.4% et 2.6% observés en 2014 et 2015 respectivement. Il sera probablement proche de 1.5%. Avant révisions pour le chiffre du T2, il faudrait 0.6% soit 2.4% en taux annualisé aux 3ème et 4ème trimestre pour converger vers 1.5%. Il y a donc potentiellement un véritable changement de régime. D’ailleurs il n’y a pas eu au T2 le rebond qui avait été observé en moyenne de 2011 à 2015.
En Espagne et au Royaume Uni le chiffre d’activité a été fort au cours du printemps. Pour l’Espagne l’expansion a été de 0.7% soit 2.8% en taux annualisé et pour le Royaume Uni le PIB a augmenté de 0.6% soit 2.4% en taux annualisé. En zone Euro, la hausse a été de 0.3% soit 1.2% en taux annualisé. C’est probablement la demande interne et notamment la consommation des ménages qui est à l’origine de cette inflexion. Mais on ne dispose pas encore du détail.
Le tableau ci-dessous donne les chiffres à retenir pour ces 5 pays pour lesquels on dispose d’informations.On relèvera le faible acquis aux USA et la robustesse de l’Espagne
Point #2 – Redressement de l’activité manufacturière en Juillet
Au mois de Juillet, l’activité du secteur manufacturier est plus robuste puisque l’indicateur mondial atteint l’indice 51, point qui n’avait pas été touché depuis novembre 2015.
Une explication majeure est le rebond observé dans les pays émergents. Les deux indices que nous suivons repassent en territoire de croissance avec des niveaux proches à 50.3 pour l’un et 50.4 pour l’autre. Le retour de la Chine au-dessus du seuil de 50 est majeur pour comprendre ces améliorations. (La reprise des commandes et la hausse de la production sont les éléments explicatifs)
Aux USA, l’indice Markit se redresse alors que celui de l’ISM s’effrite avec notamment un nouveau ralentissement du ratio des nouvelles commandes sur stocks. Erosion aussi en zone Euro avec un indice qui passe de 52.8 à 52. Amélioration au Japon mais toujours en territoire négatif. Il était temps que le gouvernement japonais se mobilise.
Dernier point majeur avec le repli brutal de l’indice britannique. Le mouvement est majeur et est encore plus terrible lorsque l’on regarde l’indice comprenant aussi les services. Cela a certainement été un signal fort pour la BoE
Point #3 – La Banque d’Angleterre réagit
Face au risque sur l’activité économique, la Banque d’Angleterre a décidé d’adopter une politique monétaire plus accommodante. Cela se traduit par une baisse du taux de référence de 25 bp à 0.25%, des mesures pour faciliter l’impact de ce repli pour le consommateur et l’entreprise, l’achat d’obligations d’entreprise pour 10 milliards de sterling et l’augmentation du plafond des achats d’obligation d’Etat de 60 milliards pour porter ce plafond à 435 mds.
Ce qu’il faut retenir ici est triple
1- La BoE ne veut pas prendre de risque sur l’activité. Les commentaires sur un Brexit Boom résultant de la baisse de la monnaie britannique (sur le tourisme notamment) ne l’ont pas impressionné. Elle ne veut pas se retrouver piégée.
2- Le deuxième point est qu’elle révise ses prévisions de croissance à la baisse pour 2017 et 2018 sans toucher à 2016. Cette année elle attend 2% de croissance soit, au regard des chiffres déjà connus pour les 2 premiers trimestres, une croissance de 0.3% (non annualisé) à chacun des deux trimestres restant de l’année. L’acquis pour 2017 à la fin 2016 serait positif d’environ 0.5%. Les attentes pour 2017 sont à 0.8% ce qui correspondrait à une croissance uniforme de 0.1% par trimestre (non annualisé). En 2018 l’activité s’accélère à 1.8%. Pour 2017 et 2018 les attentes étaient de 2.3%. Le coût associé au Brexit est donc significatif.
L’inflation accélère plus rapidement qu’anticipé reflétant ainsi l’impact de la dépréciation durable de la monnaie britannique. En 2018 elle passe au dessus de la cible de 2% et s’y maintient en 2019.
3- Le dernier point à souligner est l’arbitrage que fait la BoE. Elle préfère se concentrer sur l’activité même si cela se traduit par un taux d’inflation durablement au dessus de sa cible de 2% (tout en restant dans la zone de confort de la BoE puisque son objectif d’inflation est de 2% +/- 1%)
Les projections de la BoE ne font pas l’hypothèse d’une récession, ce qui est une hypothèse forte. Si c’était la cas il est probable que les mesures présentées pourraient être accentuées notamment le montant des achats d’actifs.
Le dernier point à retenir est l’accent mis par les banquiers centraux anglais sur l’activité et au détriment de l’inflation. Il n’est pas grave d’aller au delà de la cible centrale de 2% d’inflation. C’est un changement dans la philosophie des banquiers centraux même si l’on note que Draghi aimerait certainement être dans cette position mais sans voir, hélas, l’inflation décoller.
Point #4 – La Fed ne change pas de stratégie monétaire
Lors de sa réunion de juillet, la banque centrale américaine n’a pas modifié son taux de référence. Le seul point à noter dans le communiqué est que les risques pesant sur l’économie paraissent moins marqués à court terme.
La Fed ne donne pas le sentiment de vouloir créer une rupture dans sa stratégie monétaire. En d’autres termes, il n’y aura pas de hausses de taux rapides et récurrentes. (voir ici)
Point #5 – Robuste rapport sur l’emploi américain en juillet.
L’emploi a augmenté de 255 000 en juillet après 292 000 en juin. Depuis le début de l’année ce sont 186 000 emplois qui sont créés en moyenne. L’an dernier sur la même période (7 premiers mois de l’année, ce sont 228 000 emplois qui étaient créés chaque mois. Le ralentissement est significatif comme le montre le graphe.
La comparaison mois par mois reste néanmoins très favorable lorsque l’on regarde les deux derniers mois disponibles. Le point intéressant à souligner est l’accélération de l’emploi dans le secteur des services aux entreprises. Cela montre que l’économie tourne bien.
Néanmoins le taux d’emploi ne s’accélère pas malgré cette double hausse rapide de juin et de juillet. Il n’y a pas non plus de pressions salariales excessives, même si la hausse annuelle se cale désormais autour de 2.5% contre 2% jusqu’en 2015, et le travail à temps partiel ne s’est pas réduit en juillet.
Ces chiffres, au regard aussi de ceux de la croissance, ne plaident pas pour un changement de stratégie de la Fed.
Point #6 – Le Japon relance
La Banque du Japon étant arrivé au bout de sa logique, c’est le gouvernement qui prend la relève avec un large plan de relance dont le montant total devrait être de l’ordre de 5.6% du PIB. Cependant, cela sera réparti sur de nombreuses années. On y verra plus clair en septembre avec les discussions budgétaires lors d’une session extraordinaire du parlement sur ces questions afin d’être efficace dès la fin de l’année.