Le changement géopolitique va être un facteur clé dans la détermination de la hiérarchie des politiques.
Pendant longtemps, la combinaison d’une politique monétaire omniprésente et d’une politique budgétaire d’accompagnement a permis la période de la grande modération caractérisée par une évolution peu volatile de la croissance et de l’inflation.
Le climat et la nécessaire transition énergétique ont été introduits à dose homéopathique pour ne pas bouleverser le cadre macroéconomique existant. D’ailleurs, les exigences climatiques n’ont pas alors infléchi les comportements. La trajectoire des émissions s’est un peu ralentie mais celle des températures du globe a battu, année après année, les records jusqu’à 1.6°C au dessus de la moyenne préindustrielle en 2024.
En provoquant des tensions entre les Etat-Unis et la Chine, la technologie a bousculé ce cadre macro-économique. La technologie, vecteur de déploiement de la globalisation via d’importants transferts, est alors devenue une arme, remontant rapidement dans les préoccupations des gouvernements. L’Inflation Reduction Act américain prenait cela en compte en réinstaurant la politique industrielle associée à la technologie tout en la rendant compatible avec le climat.
La cohérence de la politique économique a volé en éclat avec l’arrivée de Trump à la Maison Blanche.
Tout d’abord, l’IA, présentée comme transcendance de la technologie, a les faveurs de Washington alors que le climat n’est plus un objectif. Pour rester compétitif, les Européens ont altéré leurs intransigeances sur le climat. Comme il a été précisé dans l’omnibus les objectifs restent mais la réalisation en est nettement simplifiée. La hiérarchie des politiques a été une première fois bouleversée. La compétition par l’IA et la technologie l’emporte sur la contrainte longue du climat. De fait, les entreprises lâchent cet objectif majeur. BP est le dernier en date.
Pourtant, depuis le sommet sur l’IA, le monde s’est davantage tordu. Les Etats-Unis ont changé de positionnement en se rapprochant de la Russie au détriment des Européens. Chaque État européen réfléchit désormais à augmenter la part de la défense dans l’ensemble des dépenses budgétaires, Bruxelles envisageant même de ne pas les compter dans les mesures budgétaires. Il faudra construire plus d’avions, d’armes, de missiles et de munitions, mettre à niveau les infrastructures militaires pour être prêt….
Avec l’irruption du politique, la hiérarchie des politiques économiques est une nouvelle fois bouleversée. Il faudra trouver des ressources pour financer le militaire et sacrifier d’autres dépenses.
La resolution de l’équation va avoir un caractère impossible. Le militaire, l’industrie été la technologie vont emporter les arbitrages. Le climat restera un objectif de second rang et la dimension sociale de l’ajustement pourrait devenir majeur, inversant les priorités poursuivies depuis les années d’après guerre.