L’action militaire de la Russie en Ukraine a fait bondir le prix du pétrole au-dessus de 100 dollars le baril. La deuxième phase de l’opération russe, après les annonces de lundi, a commencé.
L’objectif serait de démilitariser les régions qu’il considère comme indépendantes et de les dénazifier. Cela ouvre la possibilité à tous les excès.
Jusqu’à présent la réponse occidentale passe par la mise en place de sanctions essentiellement financières. Cette réponse est asymétrique par rapport à l’agression militaire. Elle considère que l’impact négatif des sanctions sur l’activité et l’emploi permettra d’infléchir l’action du gouvernement russe voire de le rendre impopulaire l’obligeant à quitter le pouvoir. Jusqu’à présent, cela n’a généralement pas fonctionné. Les sanctions pèsent sur l’activité à court terme et l’économie s’adapte. Il est rare que les gouvernements soient renversés.
Cette dimension asymétrique a reflété, par le passé, la réticence, à juste titre, des pays occidentaux à entrer dans un conflit armé alors que la Russie s’appuie sur ce levier.
S’appuyant sur des menaces très différentes l’accentuation du rapport de force ne peut s’inverser rapidement.
Pour les européens, la situation est particulière puisqu’un pays européen est agressé. Par le passé, le conflit avec la Géorgie, n’était pas perçu comme une menace pour l’Europe mais plutôt comme une réminiscence de l’ex-URSS Ce n’est clairement pas le cas avec l’Ukraine.
Au delà des tensions diplomatiques majeures, les risques sont économiques en Europe.
Le premier est un risque d’écorner la dynamique de croissance. Cela peut provenir d’un problème d’approvisionnement en matières premières tant sur les quantités que sur les prix. Ce pourrait être le cas de l’Allemagne pour le gaz et pour l’Europe globalement pour le pétrole.
Le risque sur l’activité pourrait provenir de l’incertitude provoquée par des tensions diplomatiques ou par des risques de guerre. L’économie peut être pénalisée par des reports de dépenses. Une entreprise peut repousser sa décision d’investissement en attendant une réduction des risques. Les ménages peuvent aussi reporter leurs achats notamment sur les biens durables.
Le deuxième type de risque économique est le maintien de tensions sur le prix des matières premières et notamment de l’énergie. La hausse du prix du baril de pétrole au-dessus de 100 dollars le baril l’illustre bien. La Russie est un très important pourvoyeur de matières premières. Un conflit pourrait se traduire par des prix durablement élevés. Le pouvoir d’achat des européens en serait affecté. L’achat d’une énergie plus chère se ferait aux dépens d’autres types de consommation
En cas de non résolution rapide des tensions avec un risque de conflit militaire entre la Russie et l’Occident sur la question de l’Ukraine, le risque est celui d’une réduction de la croissance et d’un taux d’inflation durablement plus élevé. Il est pour l’instant trop tôt pour conclure et chiffrer ces évolutions.
L’impact sera aussi sur les prix alimentaires, notamment celui du blé. La Russie, le Kazakhstan et l’Ukraine fournissent 40% des exportations mondiales de blé. L’Europe qui est un exportateur important (37 millions de tonnes sur les 200 millions qui sont échangées) va dans sa stratégie Farm to Fork réduire sa production de blé de 10 à 20% à l’horizon 2050 au risque de ne plus exporter. Les pays du bassin méditerranéen et du Moyen-Orient pourraient ne plus être alimentés en blé européen. Avec le conflit en Ukraine, le risque est de renforcer le caractère stratégique du blé surtout si l’Europe maintient sa stratégie de réduction de sa production. L’impact de la Russie irait alors bien au delà de l’Europe et son action pourrait être déstabilisante dans de nombreuses régions du monde s’il y a rationnement du blé.
Le dernier point sur le risque économique est de voir la BCE reporter les annonces qu’elle aurait pu faire lors de sa réunion du 10 mars. D’une maniere generale, l’irruption de l’incertitude profite davantage aux actifs sans risques (obligations d’Etat) qu’aux actifs risqués.