Une fois encore l’homme de l’année en zone Euro sera Mario Draghi.
Il l’avait déjà été lorsqu’en 2012 il avait indiqué que la BCE n’hésiterait pas à mettre les moyens nécessaires pour sauver la zone Euro.
Son raisonnement était d’indiquer que la zone Euro était avant tout une construction politique, c’est à dire une façon de vivre ensemble, et que c’est ce qu’il fallait préserver.
L’euro n’était qu’un instrument au sein de cette construction politique et qu’un instrument ne devait en aucun cas être la source d’une rupture de celle-ci.
Cela avait bien fonctionné car les tensions observées alors au sein de la zone s’étaient rapidement réduites. Pour cela la BCE s’était donnée les moyens d’acheter si nécessaire les dettes publiques notamment de l’Espagne et de l’Italie jouant alors potentiellement le rôle de prêteur en dernier ressort.Elle n’a pas alors dépensé un euro via cette procédure mais cela avait été suffisant pour réduire les tensions et finalement pour permettre d’écarter le risque d’une explosion de la zone.
En 2014 la BCE toujours sous l’impulsion de Mario Draghi crée une rupture dans l’analyse de la crise de la zone Euro. Celle-ci est structurelle plus que conjoncturelle et sa résolution passe par la mise en place de moyens et d’engagements dans la durée. C’est cela la leçon et la rupture portée par la BCE en 2014.
Au-delà des instruments le point majeur a été de convaincre que la crise de la zone Euro ne se résoudrait pas spontanément, ne relevant pas simplement d’un mauvais passage dans le cycle économique (ce qui était généralement perçu à partir de 2011 lorsque les politiques budgétaire ET monétaire sont devenus nettement plus restrictives).
Le risque de déflation qui caractérise aujourd’hui la zone n’est que le symptôme de cette crise persistante.
En abaissant le taux d’intérêt à 0% (0.05% pour être précis) et en ajoutant des liquidités à grande échelle dans la durée la BCE change la vision de la situation européenne. Associé à cette vision, il y a l’idée que pour résoudre les difficultés de la zone, il sera nécessaire de maintenir des taux d’intérêt de long terme très bas pendant très longtemps.
C’est cette inscription dans la durée de la politique monétaire qui reflète la rupture d’analyse portée par Mario Draghi. La politique monétaire doit être accommodante dans la durée afin de faciliter les ajustements et les réformes structurelles dont la zone Euro a besoin. Le président de la BCE est aussi porteur d’une rupture sur le plan institutionnel car il souhaite la mise en place d’une politique budgétaire commune.
Cela renforcerait encore davantage la construction politique de la zone Euro que Mario Draghi évoquait en 2012.