Verbatim de ma chronique de ce matin
L’arrivée de Syriza au pouvoir en Grèce va bousculer l’Europe. Elle va l’obliger à réfléchir sur la façon dont elle fonctionne.
Depuis 2011 la politique économique en zone Euro est marquée par l’austérité. C’est vrai en Grèce mais aussi dans d’autres pays comme l’Espagne, l’Italie ou encore en France avec une hausse spectaculaire de la fiscalité. Globalement cette politique n’a pas bien fonctionné. Les déficits publics ne se sont pas résorbés rapidement, ils restent encore élevés en France et en Espagne par exemple, et surtout la croissance n’a pas redémarré. Le PIB de la zone euro au 3ème trimestre 2014 est encore inférieur à celui du premier trimestre 2011.
La Grèce a été particulièrement affectée par la mise en place d’une politique d’austérité. Son activité a chuté de 25%, comme les Etats-Unis après la crise de 1929, son solde budgétaire hors paiement des intérêts sur la dette est excédentaire et pour autant la dynamique de la dette publique n’est pas soutenable. Les efforts faits pour respecter le programme d’austérité ont été considérables mais n’ont finalement pas abouti à une situation robuste et satisfaisante en Grèce.
Jusqu’où faudrait-t-il aller dans l’austérité pour que la Grèce puisse être perçu comme un bon élève ? Personne ne répond à cette question et c’est cette réponse manquante qui a incité les grecs au changement de pouvoir.
Cette question pose aussi celle de la solidarité entre les pays de la zone Euro. Comme en Espagne notamment, les européens ont imposé des programmes très contraignants et ont observé le processus d’ajustement de ces pays. Mais il n’y a pas franchement eu de dynamique collective qui aurait permis une mutualisation des coûts d’ajustement auxquels ces pays ont eu à faire face. C’est aussi pour cela que c’est en Grèce et en Espagne que les options politiques les plus radicales sont observées. En Grèce l’arrivée au pouvoir de Syriza traduit cet inconfort vis à vis de la construction européenne. En Espagne la force de Podemos repose aussi sur cette construction qui manque de solidarité.
L’équilibre entre les pays du nord et du sud n’est pas établi car il n’existe pas de mécanisme de solidarité et de mutualisation. Personne ne veut franchement payer pour rétablir l’équilibre d’un autre membre de la zone Euro.
D’une manière générale, ce que reflète l’arrivée au pouvoir de Syriza est l’absence de dynamique collective. Cela pourrait passer par un budget fédéral comme le suggérait Mario Draghi dans son discours de Jackson Hole l’été dernier. Pour l’instant il est trop tôt pour aller dans ce sens et c’est pour cela que la politique monétaire menée par la BCE est intéressante. Son objectif via la baisse durable de l’euro et le transfert des risques vers la BCE est de créer des conditions nouvelles pour l’ensemble des pays membres de la zone. C’est une première étape mais il faut réfléchir à nouveau sur la dynamique collective de la zone Euro en dehors de la politique monétaire. La zone Euro est une construction politique avant tout qui ne doit pas se limiter à une mosaïque de pays. C’est cela l’enjeu aujourd’hui pour la zone euro et le changement de pouvoir en Grèce le met au premier plan.